Version director's cut de 1997 (209 minutes) :
L'une des forces du Cinéma, lorsqu'il est remarquablement mis en scène, c'est de nous faire vivre un film, de ne plus en être un spectateur mais d'avoir l'impression d'être au côté des personnages. C'est ce qui arrive avec Das Boot, qui nous fait passer de longues heures dans un étroit sous-marin en temps de Guerre.
C'est même un quasi huis-clos, et Wolfgang Petersen prend son temps pour nous présenter ceux qui vont nous accompagner durant ce périple chaotique. Il parvient à les humaniser, il n'y a plus d'histoire d'alliés, juste de gueules qui doivent exécuter des missions et surtout vivre ensemble, devant faire face à l'ennemi, aux conditions compliquées d'un tel sous-marin et aux ordres venant des bureaux, toujours prêt à briser les rares mais importants espoirs de ces gars. Si les combats sont importants, même cruciaux, ils sont bien moins mis en avant que les personnages et la vie à bord du sous-marin.
Une telle précision n'aurait pas été possible sans le savoir-faire de Petersen et sa mise en scène aux petits oignons. C'est un petit bijou de réalisation, il parvient à créer une atmosphère intense, parfois étouffante et toujours sujette à émotion, soigne les cadres pour mieux nous immerger au cœur de ce bâtiment de Guerre et nous faire ressentir son aspect étroit, humide (évidemment !), sombre et un peu crade, logiquement. Il ne laisse rien au hasard et on ressent chaque battement de cœur des personnages, mais aussi la vie à bord, les moments calmes, la monotonie des jours ordinaires, l'angoisse à l'approche des combats, la réaction lorsque ceux-ci arrivent ou la calme avant la tempête.
En humanisant les protagonistes, il les rend attachants et ils sont étoffés, sans avoir besoin de connaître leur passé, juste avec l'humanité qu'il dégage, les comportements face aux dangers. C'est notamment le capitaine que l'on va aimer suivre dans ce voyage au bout de l'enfer, sa façon de faire face à l'ennemi ainsi qu'à une possible démobilisation de ses troupes, ou du moins éviter qu'ils craquent mentalement. Ils sont associés à un scénario qui exploite parfaitement les péripéties, sans avoir besoin d'en avoir beaucoup, chacune étant passionnante et sujette à ressentir l'enfer de la situation.
Les plans en extérieurs sont d'ailleurs peu nombreux, tant Petersen se concentre sur l'aspect claustrophobe et oppressant de l'intérieur du sous-marin. Les idéologies, ainsi que possibles faiblesses, sont laissés de côtés par ces gars et de l'émotion en ressort, donnant quelques séquences mémorables. Les décors sont adéquats à l'ambiance, assez sombres et sales, alors que les quelques scènes de combats sont remarquablement mises en scène. Enfin, la bande-originale participe aussi à la réussite de l'oeuvre, tout comme les comédiens qui se font oublier derrière les personnages, à l'image de l'inoubliable Jürgen Prochnow.
En signant Das Boot, Wolfgang Petersen fait preuve de minimalisme et nous immerge au cœur d'un véritable Enfer, un sous-marin Allemand durant la Seconde Guerre mondiale, et, tout en humanisant les personnages, nous fait ressentir l'aspect oppressant de ce voyage, ainsi qu'intense et d'une rare puissance.