Un film pour les rêveurs

Il y a souvent une grande différence entre les héros de cinéma et la vie réelle. Les personnages sont charismatiques, intelligents, différents, ont un talent particulier. Ils sont beaux, pulpeux et aventuriers.

Parfois, ces films aux personnages parfaits nous rendent tristes parce qu'on n'arrive pas à s'y identifier. Un personnage de cinéma, ça peut aussi être une personne normale, simple, voire réservée. Cela peut être une personne qui n'a pas confiance en elle, qui vit sa vie comme elle peut et qui essaye d'atteindre ses rêves avec les moyens du bord.

Le Beau Monde, c'est l'histoire d'Alice, une étudiante simple, une fille complètement normale qui n'a ni talent fou ni idées papillonantes, et qui veut tout de même se lancer dans le monde de l'art, de la mode et du textile.
Une fille sensible, discrète, rêveuse et souvent dans son monde, qui est pleine d'ambition pour entrer vers un monde éloigné : la culture, l'art, les musées, les intellos, l'élite, les soirées de bohème avec des discussions d'artistes qui durent toute la nuit.

Alice entre dans une école de mode spécialisée dans la broderie et elle rencontre des gens cultivés. Elle essaye de tenir des conversations intellectuelles, presque philosophiques, mais ces arguments sont bancales, faibles, simplistes. Elle est jeune, 20 ans, elle est timide, mais elle essaye de se hisser vers sa passion malgré sa petite personne. Elle est discrète, on ne sait pas ce qu'elle pense, peut-être qu'elle ne pense pas. Elle se sent toujours de trop, à côté de la plaque. C'est touchant et réaliste.

Le film est lent, comme la vie lorsque l'on débute. On voudrait arriver tout de suite à un métier passionnant, mais avant on patine. De longs plans sur des falaises Normandes, des fleurs sauvages, des regards perdus. Pas beaucoup de musique en bande-son, des silences, le bruit de la vie. Une mise en scène reposante et humble, comme Alice.

Dans ce film, la jeune fille entre plus ou moins dans "Le beau monde" grâce à son amoureux, un photographe moyennement talentueux qui se prend pour Avedon, et qui vient d'une famille bobo chic. Mais tout reste superficiel, elle n'est que cette fille de 20 ans qui essaye d'avancer. Elle ne se rend pas compte qu'elle avancerait mieux seule et par elle-même.
Une bonne partie du film est consacrée au décalage entre les classes moyennes et les riches, mais la réalisatrice, Julie Lopes-Curval, aura essayé de tisser des liens entre ces gens. On ne sait jamais si Alice, petite fille des HLM, aura vraiment trouvé sa place chez la belle famille.

Dans tous les cas, ce film est doux, rêveur et aérien ; il plaira à toutes les filles un peu paumées, les sensibles et les artistes en herbe.

Article sur mon blog : http://fruitsquonfit.wix.com/blog-culture#!Le-Beau-monde-critique-dune-rêveuse/c1rfl/5565fee70cf235f8195cac45