Coup de maître de la part du réalisateur Mauro Bolognini et du scénariste Pier Paolo Pasolini que d'avoir réuni deux sex symbols comme Marcello Mastroianni et Claudia Cardinale, au potentiel sensuel et sexuel relativement incomparable dans l'Italie des années 1960, pour mieux les confronter sur le terrain d'un drame conjugal dont le carburant provient d'un tabou assez fort. Car Mastroianni, depuis qu'il a connu son premier amour, est devenu inapte à la bandaison — une condition qu'il décrit à son cousin, Tomás Milián (une scène courte mais touchante et dont les conséquences seront révélées à la toute fin), au creux d'une magnifique confession — dans une société qui glorifie la virilité masculine à tous les étages, familial, religieux, professionnel.
Et le pauvre hère, il va en bouffer de la pression sociale par tout son entourage, et tout particulièrement son père, très bien interprété par un Pierre Brasseur dont l'honneur virile est bafoué par ce "mariage non-consommé". Expression abominable qui en plus de cela se double d'une rumeur se propageant comme une traînée de poudre dans tout le village... Il faut dire qu'un an après le mariage tout le monde l'attendait, la grossesse de Cardinale, fille de notaire d'une beauté renversante mais elle aussi reproduisant plus ou moins involontairement le schéma traditionaliste martelé par ses proches et porté sur les apparences et la peur de ce que penseront les autres.
À l'époque, Marcello Mastroianni avait marqué les esprits avec son rôle de séducteur mondain par excellence dans La dolve vita, et en réaction immédiate il cassa cette image en incarnant la tragédie d'un homme aussi séduisant qu'impuissant, avec au moins autant de talent. Sa performance est vraiment remarquable, pris au piège d'un réseau de contraintes et de conventions qui s'est refermé sur lui violemment, le laissant dans une horrible situation, le déshonneur familial comme fardeau insoutenable. Il interprète de manière remarquable une sorte de Don Juan victime d'une réputation qui n'est même pas la sienne. Il n'y a pas de place pour l'amour platonique dans ce coin de Sicile, et du curé aux beaux parents en passant par la foule de voisins et de témoins lors du mariage, tous sont là pour dicter les règles et façonner les mœurs. Un film très puissant sur la pression exercée et l'humiliation subie en retour, avec une douleur dépeinte de manière percutante et sensible, et la folie qui guette ceux qui se soumettent à de pareilles injonctions — le père comme d'autres place la procréation au centre de tout et le non-respect de cette clause tacite le place au bord de la démence, lui qui de façon ironique mourra précisément en plein ébat.
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