Le Bel Antonio c’est d’abord l’aveu d’impuissance d’un scénariste (Pasolini, pour ne pas le nommer) et, dans une moindre mesure, d’un cinéaste (Bolognini).
Comment ne pas voir, à travers ce Mastroianni maquillé comme un travesti et castré dans sa virilité (comme devait se sentir un homosexuel à l’époque, et parfois encore aujourd’hui), un double de Pasolini, montré du doigt, méprisé, ostracisé par la société masculine traditionaliste prédominante - voire de Bolognini qui a sacrifié sa vie personnelle (ou l’a bien cachée) au détriment du cinéma ? Sans aucun doute, l’homme à l’orientation sexuelle assumée projette dans son personnage ses maux personnels auxquels le réalisateur consent.
Mais ce n’est pas là où le bât blesse, au contraire. Le seul point sur lequel se soutient le film est cette critique d’une vision à la fois masculine (caricaturée par le personnage primitif du père qui, lorsqu’il est grandement déçu et publiquement humilié par son fils, se retrouve aux bords de la folie passagère) et catholique dont la procréation est le centre vital et l’argent un considérable agrément.
Le vrai problème, comme bien souvent avec Pasolini, c’est cette impuissance à raconter, à tenir en durée, à construire quelque chose de solide et par conséquent, à complexifier un point de vue généralement unilatéral et manquant de nuance. En effet, non seulement le scénario tient en quelques pages, si bien que narrativement tout cela est bien plat, comment en témoignent de nombreuses scènes, plus qu’attendues, patinant sur place, ne menant nulle part ; mais en plus l’idée principale manque de dialectique, de richesse d’idées, d’atténuation à tel point que l’on se retrouve confronté à deux positions radicales et antinomiques dont une apparaît indéfendable, et l’autre devenant forcément celle pour laquelle opter, et ce sans jamais montrer d’ambivalence ni de contraste.
Un film (c'est dit sans complaisance) dont il faut juger avec les neurones plus qu'avec les hormones.