J'ai revu ce western et je l'ai sérieusement revu à la hausse car je l'avais noté 5/10 de mémoire, je n'en avais plus aucun souvenir ou alors je l'ai confondu avec un autre western. Il s'agit d'un des derniers films de Michael Curtiz qui n'a pas tellement abordé le western dans sa longue carrière, il ne devait plus réaliser que 5 films jusqu'à sa mort en 1962, dont les Comancheros en 1961 qu'il ne put d'ailleurs terminer. En 1959, certains critiques malfaisants le croyaient fini et ont raillé ce film ; c'est un western qui n'a rien de spécialement extraordinaire mais il possède un charme indéfinissable qui ne nous lâche plus jusqu'à ce surprenant happy end, c'est exactement l'effet que ça m'a fait ; je ne regrette qu'une chose, c'est qu'il soit en noir & blanc, je suis sûr que le Technicolor lui aurait apporté un plus, mais apparemment, ou c'est un choix de Curtiz, ou c'est Paramount qui a joué les radins par manque de budget.

L'intrigue est plutôt classique mais le traitement est inhabituel ; il n'y a ni fusillade, ni chevauchées, ni grands espaces, c'est un western urbain, en vase clos, dont le scénario mise plus sur l'enquête menée par l'homme de loi incarné par Robert Taylor (qui se défend d'être un bourreau), et qui insiste plus sur l'humain que sur l'action. Ceci peut sembler paradoxal de la part d'un réalisateur comme Curtiz, habitué à l'action ; rappelons-nous les films qu'il a fait en dirigeant Errol Flynn. En fait, il met en place une atmosphère, un décor de petite bourgade et des enjeux.

Les acteurs sont bien dirigés, Taylor comme à son habitude, incarne un personnage dur, cynique et pète-sec, il a souvent servi ce jeu, que ce soit dans ses westerns, mais aussi dans ses drames et ses films d'aventure, il suffit de se rappeler Quentin Durward, la Vallée des rois, la Perle noire, Quo Vadis? (où il est un Romain conquérant et imbu de lui-même), le Trésor du pendu, Convoi de femmes, et bien sûr la Dernière chasse, probablement son rôle le plus dur et le plus ignoble. C'est en partie pourquoi je n'ai jamais été trop fan de cet acteur, car il sert presque toujours le même sentiment, sans trop de nuances, mais attention, je ne le déteste pas, et je respecte son statut de star. Le seul film où il apparaissait plus humain est sans doute Ivanhoë, qui de plus est un film de chevalerie et un de mes films fétiches.

Le reste du casting est excellent : Fess Parker, sorti de sa défroque de Davy Crockett qu 'il a incarné dans une série de films, campe ici un sheriff candide mais lucide ; Tina Louise, actrice peu connue qui n'a pas eu la chance de tourner de très grands films, est une très belle personne autant qu'une bonne actrice, elle sera encore remarquable la même année dans un autre western, la Chevauchée des bannis qui a soi-disant inspiré Tarantino pour ses 8 salopards. En tout cas, dans ce rôle de femme un peu ballotée par Taylor, elle renvoie un côté émotionnel face à ce rude homme de loi. Jack Lord après avoir été l'année précédente un cowboy psychologiquement dérangé dans l'Homme de l'Ouest de Mann, livre ici le contraire en incarnant un homme rangé, plein de bonté, qui a commis une erreur et qui s'est amendé. De cette façon, il annonce un peu son personnage de McGarrett qu'il jouera dans la série Hawaï police d'Etat pendant 8 saisons.

Quant à Mickey Shaughnessy, Gene Evans, James Westerfield ou Lorne Greene, ils ont des rôles de suppléants plus conventionnels, mais on est content de voir ces figures familières, et ils tiennent bien leur fonction. Voila donc un bon western, Curtiz offrait à défaut d'un chef-d'oeuvre, un western très plaisant, bien écrit, bien interprété et solidement réalisé.

Ugly
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