Quelques jours à peine après "La chute de la maison Usher" (Epstein, 1928), j'ai continué mon parcours dans le cinéma muet en découvrant le film d'une star du cinéma muet, aujourd'hui, hélas assez oublié : on peut que remercier la Cinémathèque de nous faire redécouvrir ses films et merci, personnellement, à mon ami spécialiste du cinéma muet, qui m'a chaudement recommandé cet acteur, réalisateur : Ivan Mosjoukine.
Retour en 1923. J'ai vécu les 108 minutes de découverte de ce film comme un trip, ayant le sentiment d'avoir voyager dans le temps, dans une époque, que je n'ai hélas, pas connue.
Malgré une ouverture un peu effrayante (c'est un cauchemar), la suite nous présente une femme qui est mariée avec un type très riche qui la soupçonnera bientôt de le tromper mais qui se méprendra et engagera un mystérieux détective pour lui rendre son âme...
Tout d'abord, le film est une déclaration d'amour à Paris : on y voit la ville de l’époque, qui apparaît si moderne, fluide, vivante mais déjà tout ce qui contient une ville : toutes les voitures, tous les gens. On aura même une course-poursuite et des séquences sur les Champs-Elysées. Du fait qu’il fut tourné en décors réels, on y voit des gens regarder directement la caméra, ne sachant visiblement pas qu’ils sont filmés.
J’ai vraiment beaucoup aimé ces séquences de Paris. Ça m’a fait penser bien sur au clip « Truly, Madly, Deeply » (Savage Garden, 1996), nous faisant voyager aux quatre coins de cette ville.
Il y a même une scène à un moment où « Elle » (la femme) et le détective se disent tout ce qu'ils y aiment.
A 34 ans, pour son dernier film en tant que réalisateur, Mosjoukine met tout ce qu’il aime dans le cinéma. Derrière la caméra, il filme donc avec amour Paris, ose, outre les scènes oniriques, quelques expérimentations en termes de plan et comme acteur : il est vraiment irrésistible – souvent drôle, parfois excessif dans le rôle de ce détective. On sent qu’il est en roue libre, improvisant peut être : la scène, encore, de la déclaration d’amour à Paris où il se mets debout, se tenant sur les pieds de deux accoudoirs d’une chaise, montre une vraie souplesse du corps.
Il maîtrise son récit du début à la fin, plus on avance, plus on comprend où il veut en venir et le message qu’il veut délivrer. C’est une œuvre – un moment – qui m’a secouée.
Pas vraiment un conte – sauf le ressort fantastique pour faire avancer l’histoire – mais plutôt une histoire parfaitement cohérente, avec un début et une fin, dans un Paris de l’époque. Une œuvre extrêmement romantique.