Etrange film que "Stage Door Canteen", un joli mélange improbable entre le film de propagande qui se veut soutien du moral des troupes et la présentation réelle de comment un célèbre lieu new-yorkais offre finalement du réconfort à ses soldats avant le grand départ...

Sorti en 1943, écrit par Delmer Daves, réalisé par Borzage, le film a purement une vocation utilitaire mais fascine par son choix scénaristique... Nous mettre à la place du troufion en partance jusqu'à l'absurde... Bien sûr, le film propose trois ou quatre héros modèles d'engagés à deux doigts de partir, permissionnaires pour quelques jours dans une ville merveilleuse qui se résume à un seul endroit, gratuit et idéal : bouffe à volonté, une danseuse par militaire et le service rendu par les stars... George Raft fait la vaisselle, ça vaut le détour, le reste est du même tonneau...

Du coup, chassé-croisé entre l'histoire prévue et le spectacle du lieu : sorte de music-hall génial où tous les plus grands talents se retrouvent pour deux ou trois minutes... Merle Oberon distribue les tables, Harpo sort d'une cabine, le vieux fou de Mary Poppins est déjà là pour faire rire dans les vestiaires, et ça change tous les soirs...

Alors, on regarde, parfois, c'est moyen, vieux numéro miteux, chanteur désuet, lourdeurs de l'histoire rajoutée, et puis Count Basie, et puis un strip-tease de feu, des blagues qui se mélangent entre la scène et le film, peu importe, les numéros sont calibrés au millimètre, c'est fou tout ce boulot pour envoyer des gosses mourir au front, mais c'est bien fait, très bien fait, chacun donne de sa personne, on reconnait Bidule, puis Truc, et ce type joue des claquettes comme personne !... Dans la salle, sur la scène, peu importe, Ethel Waters, Benny Goodman, Freddy Martin, Guy Lombardo, Kenny Baker... C'est pas non plus la pire musique du monde, et puis, vous avez déjà vu en coulisse Franklin Pangborn imiter Johnny Weissmuller ?

Sinon, à un moment avec juste l'aide d'un léger piano, Yehudi Menuhin reprend sur son violon l'Ave Maria de Schubert et la salle s'arrête, comme le temps, et même vous, le pire d'entre vous, vous fermeriez votre gueule dégénérée pour écouter en silence ce moment magnifique qui est tellement beau que le bonhomme a même prévu quelque chose pour en sortir : le Vol du bourdon de Rimski-Korsakov, absolument fabuleux...
Torpenn
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le 18 août 2012

Modifiée

le 18 août 2012

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Torpenn

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