Très impressionné par ce thriller qui aurait pu tomber dans tous les pièges possibles et imaginables lorqu'il s'agit de jouer sur les engrenages pour ensevelir son scénario dans un marasme de réactions en chaînes, à l'instar de The Game. Il n'en évite pas certains, évidemment, mais le sujet original et le grand mystère des trente premières minutes se perpétue assez bien, et ce jusqu'à la fin, là où d'habitude, ces films dits de "malaise" voient leur côté énigmatique s'envoler l'heure passée. Cette prouesse est dûe à la réalisation épurée, qui se permet même de perdre un peu de sa pudeur en bout de course, longues mélodies qui isolent les personnages en prime, et à une volonté du réalisateur de se concentrer sur ses personnages plutôt que sur l'intrigue.
Joel Edgerton, qui joue un des rôles principaux dans son propre film, raconte l'histoire d'un couple qui fait la rencontre d'un ex camarade de classe. Dans un premier temps attentionné, ses attentions vont vite paraître suspicieuse, jusqu'à ce que le couple se sente persécuté. Commence alors un jeu malsain où, derrière chaque cadeau, se cache les névroses d'un homme qui semble intimement lié au couple. Simple illuminé ou psychopathe fou furieux ? Il se pourrait que leurs doutes soient très loin de la réalité...
Ce que j'ai aimé dans ce film, c'est le côté étrange et glauque qui n'est pas tiré par les cheveux et qui ne finit pas en pugilat, à la American Nightmare. Ici, le film reprend exactement les mêmes codes que le très bon In Their Skin, et fait déraper ses personnages dans une psychose fine et indolore. Pas d'effusions de sang, pas de violence, tout le mystère réside en plein cœur des personnages qui tout au long du film ne cesseront jamais d'être isolés les uns des autres. Le Cadeau n'a rien d'un grand film parce qu'il ne cherche pas à en être un, et par ce biais arrive, sans prétention, à aller au bout de son sujet. Le scénario est maîtrisé de bout en bout, se permettant même un plan final assez somptueux. Un film avec des acteurs en réussite (Jason Bateman nous fait passer par toutes les émotions, Joel Edgerton est une énigme à lui tout seul) , un discours intelligent et une construction narrative bien ficelée. Les personnages, loin des clichés - sauf peut-être la femme, sont intéressants et marqués d'une profondeur qui tient la route malgré le squelette fragile du thriller. Un très bon moment, agréable surprise, qui ne tombe pas dans la facilité de l'horreur, même si, avec une assurance certaine et un talent bien rodé (ce que n'a pas encore le jeune réalisateur), ajouter de l'épouvante n'aurait pas été une si mauvaise idée.