Après les succès des "Sept samouraïs" et "Vivre dans la peur", Kurosawa ose lancer son projet de transposition du "Macbeth" de Shakespeare dans le Japon des samouraïs du XVI° siècle. Un film risqué vu l'énorme échec qu'avait été la version d'Orson Welles en 1947. Mais Kurosawa se veut moins fidèle que Welles dans sa version. Il en garde la structure, l'adapte au Japon, mais ne reprend pas du tout les dialogues de la pièce. Son pari va être d'en faire une version s'approchant du théâtre traditionnel No. Là encore, c'est un gros risque. Ce style théâtrale japonais est totalement hermétique aux étrangers et risque de faire perdre l'adhésion du public étranger.
Kurosawa était un grand admirateur du théâtre No, qui était l'antithèse parfaite de ce qu'il faisait au cinéma. Il avait cependant déjà pu faire quelques clins d'oeil dans ses films précédents sous forme généralement de costumes particuliers de référent au style si codifié.
Avec "Le château de l'araignée", Kurosawa ouvre une nouvelle voie dans son cinéma en assumant en pleine conscience ses influences du théâtre No. Non seulement visuellement dans les décors ou les costumes, mais aussi par le jeu minimaliste de ses acteurs. L'actrice Isuzu Yamada eu ainsi consigne de n'avoir aucune expression dans son visage et de ne pas cligner des yeux durant les prises. Toshiro Mifune eu plus de mal à se soumettre à ces règles, préférant un jeu dans la continuité de son rôle des "Sept samouraïs". Néanmoins la voie été ouverte. Kurosawa approfondira ce genre dans ses derniers film "Kagemusha" en 1980 et surtout "Ran" en 1985, dans une adaptation cette fois du "Roi Lear".
Visuellement on retiendra de ce film la très belle photographie contrastée en noir et blanc et les plans surexposés des apparitions des spectres. Mais aussi l'énorme décor du château qui fut construit au pied du Fujiyama avec l'aide des soldats américains de l'US Army stationnés dans la région.
Aujourd'hui considéré comme un chef d'oeuvre, le film fut pourtant un échec à sa sortie. L'idée de mélanger Shakespeare et le théâtre No, ne plut pas aux public japonais et le succès à l'étranger ne fut que d'estime en raison des faibles réseaux de distributions des films nippons à l'époque.