La Critique du Film

Parce que quitte à donner un titre français aussi réducteur à cause d'un certain mépris de la part de quelques distributeurs snobs, autant jouer le jeu jusqu'au bout en se moquant de cela avec le titre suivant pour cette critique (de toute façon, je n'arrive à rien trouver d'autres, donc au moins ça me sauve ha ha).

Mais bref, on ne va pas s'attarder sur ce foutu titre, parce que sinon on ne va pas en finir avec ce film, qui est donc la première fois de Jackie Chan aux États-Unis. En effet, l'acteur a dû, pendant un temps, partir là-bas suite à une rupture de contrat face à son ancien producteur Lo Wei qui aurait carrément fini par impliquer les Triades Chinoises.

On a donc affaire à un film se déroulant dans les années 30 (une période qui est d'ailleurs très bien retranscrite) dans lequel on suit les mésaventures de Jerry Kwan (joué donc par Jackie) et de ces confrontations avec des gangsters, jusqu'à en arriver à sa participation (forcée par un de ces gangsters) dans un tournoi considéré comme illégal, le Battle Creek Brawl.

Au risque de me faire lyncher par certains, je tiens à dire que j'ai été agréablement surpris. En effet, toutes les fois où j'ai entendu parler de ce film, de la première tentative de Jackie à entrer dans le cinéma Occidental, c'était toujours de manière négative. Du coup, forcément, je m'attendais à un film au mieux bof, au pire horrible. Bah au final, j'ai eu le droit à un film moyen. Alors oui on est clairement loin du film parfait, mais pour une première au pays de l'Oncle Sam, je pense que ça aurait pu être pire et je vais tenter d'expliquer pourquoi.

Démarrons déjà par les personnages et il faut savoir que plusieurs dans le lot arrivent à être attachants, notamment Jerry et Nancy (jouée par Kristine DeBell), qui forment un couple qui m'a semblé plutôt crédible et même mignon par moment. En plus, elle n'est jamais le "boulet du groupe" et ne finit pas comme une demoiselle en détresse, ce qui n'est franchement pas pour me déplaire (bon par contre on a tout de même un autre personnage féminin qui finit par se faire kidnapper et utiliser comme moyen de pression, on ne peut pas tout avoir non plus au vu de l'époque où le film a été conçu ^^').

D'ailleurs, j'en profite pour dire que les acteurs font plutôt bien le job. Je les ai trouvés crédibles et certains arrivent même à rendre leurs personnages plus sympathiques alors qu'ils sont censés être plus antipathiques que ce que leurs jeux laissent entendre. Je pense notamment à Domenici, (joué par José Ferrer) qui en plus, ressemble curieusement à Walt Disney dans ce film.

D'ailleurs, pour revenir sur les personnages, celui se nommant Herbert Kwan (joué par Mako, oui oui, le narrateur de Conan le Barbare et Splinter de TMNT Les Tortues Ninja, hélas son dernier rôle, paix à son âme) sauve clairement le film. Non seulement il a un vrai charisme, non seulement il est tout aussi attachant que Jerry et Nancy, mais en plus il se bat avec UNE CANNE. Et ça offre des chouettes chorégraphies basées sur cet aspect. Même sans sa canne il arrive à être badass en arrachant par lui-même une lourde palissade venant d'un tribunal auquel il était attaché pour s'enfuir ! Nan vraiment, s'il y a bien une raison pour laquelle ce film vaut le coup d'œil, c'est pour son mentor. Même s'il n'apparaît pas dans l'intégralité du long-métrage.

Jackie non plus n'est pas en reste rassurez-vous, puisque lui aussi a le droit quelques combats avec une chouette chorégraphie, à savoir ceux où il affronte Herbet en guise d'entraînement, mais aussi un autre où il doit faire face à deux jumeaux. Bon par contre, profitez-en bien de ces combats. Vous comprendrez plus tard pourquoi je dis ça.

Je tiens également à souligner l'humour du film, que j'ai trouvé plutôt correct. On reste dans du burlesque et dans un style très proche que ce à quoi Jackie Chan a et continuera de toucher. Mention spéciale au passage précis avec le fameux Cri de Willem qui m'aura bien fait rire.

J'ai également trouvé que la mise-en-scène (en dehors des combats du moins j'y reviendrai), arrivait à proposer un travail convenable la plupart du temps. Je pense notamment au plan où Jerry tient un couteau, se déroulant dans un cinéma vide et éteint, avec donc une très faible luminosité venant de l'extérieur, Jerry se retrouve avec un couteau à la main, face à un personnage particulièrement détestable, le visage dans l'ombre. Il a alors l'air d'hésiter pendant un moment, jusqu'à finir par le planter dans le chapeau de l'agresseur se trouvant à côté, pour ensuite revenir dans le peu de lumière mentionné plus haut. On a donc une mise-en-scène montrant qu'il a été tenté par sa part sombre avant de revenir vers sa part lumineuse grâce à la décision qu'il a pris, du vrai "show don't tell". Ça, c'est du vrai cinéma. Bon cela dit, on a aussi le droit à des choix pour le moins étranges, comme le freeze frame qui a lieu juste après que Jerry ait remporté la course de roller, alors que cet évènement n'a pas de réelle importance dans le reste du film et que ça n'en est même pas la fin.

On a également le droit à une musique principale fort sympathique, que j'aime beaucoup mais… Qui est assez hors-sujet en fait. En tout cas, dans la majorité des scènes où on l'entend. C'est d'ailleurs la même chose pour les autres musiques, mais en plus elles sont assez oubliables.

Par contre, bien qu'il y a quelques combats chouettos comme dit plus haut, le reste (qui est malheureusement majoritaire) est assez ridicule, voir sans enjeux, dans le sens où on n'en voit pas l'intérêt puisqu'on a aucun signe pouvant nous faire croire que l'issu n'est pas forcément celle qu'on croirait au premier abord. Le combat final, opposant Jerry à Billy Kiss (joué par Hard Boiled Haggerty, un ancien catcheur) est un parfait exemple de ce problème. En plus, pour ne pas aider, tous les combats ont le droit à une mise-en-scène plate, mention spéciale à la sale manie du caméraman de les filmer de loin. Nan parce que s'ils ne veulent pas qu'on voit les combats de manière optimale, c'est réussi. Bref, Jackie n'a pas pu s'occuper de mettre en place les bagarres du film et malheureusement, ça se ressent.

Je trouve également que certaines scènes sont assez inutiles dans le récit, soit parce qu'elles manquent d'intérêt, soit parce qu'elles finissent par mener à rien, dans le sens ou on n'a pas un pay-off satisfaisant. Un parfait exemple, c'est la première scène avec Kiss, car concrètement, à quoi a-t-elle servi ? Pas grand-chose finalement. On aurait pu introduire cet antagoniste à partir du début du Battle Creek Brawl voir même un peu avant, surtout qu'en plus il n'intervient aucunement dans le reste du récit. Et si c'est pour montrer qu'il est dangereux, là encore mes suggestions suffisaient. Ou alors, il aurait été mieux de faire comme Shere Khan dans Le Livre de la Jungle de 1967, insinuer à quel point il est dangereux via quelque touche de dialogue, en rebondissant sur le fait qu'il a vaincu les précédents poulains de Domenici. Bref, on aurait pu se passer de cette première scène.

Le dernier reproche que j'aurai à faire concernant ce film, c'est qu'il a une fin beaucoup trop abrupte, laissant des points scénaristiques à un stade non-résolus ou mal résolus. Ainsi, on compte parmi ceux-ci la non-approbation de Mr. Kwan (joué par Chao-Li Chi) à propos de la pratique des arts-martiaux de son fils (on le voit juste heureux lorsqu'il entend les commentaires des juges à propos des performances de Jerry, sans savoir exactement pourquoi il a changé d'avis, juste parce qu'il sait qu'il va gagner de l'argent ?), le sort de Jug (joué par Peter Marc), le pote de Jerry (on ignore s'il survit à sa mutilation, la dernière fois qu'on le voit, c'est après qu'il ait été récupéré par Jerry et son frère, un docteur) celui de Mae (jouée par Rosalind Chao), la fiancée du frère mentionné plus tôt (c'est elle qui se fait kidnapper, mais après ça on ne la revoit plus jamais) et celui de Miss Wong (jouée par Jocelyn Lew), ainsi que les relations entre les gangsters du coin et les relations entre Domenici et son fils Leggetti (joué par Ron Max) après ce qu'il s'est passé durant le tournoi. J'en ai probablement oublié d'autres, mais je pense que c'est amplement suffisant pour vous donner une petite idée du problème.

Enfin, le film propose également une VF que j'ai trouvé correcte dans l'ensemble… En tout cas, je la trouve bien mieux que la VO, puisqu'elle permet de planquer le redoublage très mal dissimulé qu'ils ont ajouté en post-prod sur Jackie parce qu'il avait du mal à parler correctement anglais (il paraît même qu'il passait plus de temps à refaire des prises pour qu'il parle anglais correctement plutôt que refaire des prises pour les scènes d'action).

Bref, vous l'aurez compris, ce Battle Creek Brawl, ou Le Chinois si vraiment vous voulez rester sur les noms français, m'a quand même fait passer un bon moment, malgré ces défauts mentionnés plus haut car en termes de productions américaines. Certes, c'est moyen et je peux comprendre qu'il y en ait qui n'aime pas ce film, mais je reste persuadé qu'il a assez de qualités pour qu'on puisse également en profiter. En tout cas et là-dessus je n'en démordrai pas, ça reste bien mieux que la trilogie Rush Hour.