Jeux de miroirs
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Parler de la radicalisation, c'est marcher sur la corde raide. Ou avoir la volonté maligne de provoquer, d'utiliser une certaine forme de simplisme. Pour mettre le feu. Ou mettre en garde.Ou enfin montrer du doigt une religion.
Le Ciel Attendra fuit la polémique. Se garde bien de jeter la pierre ou encore de trouver des coupables. Le Ciel Attendra ne démontre rien. Ne donne pas de leçon de morale. Et si certaines critiques ici parlent de superficialité du propos, c'est qu'elles ne comprennent sans doute pas l'oeuvre dans sa démarche.
Une démarche qui touche à l'intime. Qui tend à dire, au gré d'un montage parallèle qui redistribue les cartes du temps, que le mal frappe de manière indistincte, dans tous les milieux. Que chacun peut se voir un jour frapper par la foudre, et voir sa porte enfoncée dans une opération de police antiterroriste.
Une démarche qui s'attache à montrer comment évolue, en silence, l'embrigadement. Ses rouages diaboliques, l'exploitation des faiblesses, du deuil, d'une certaine forme d'innocence et de crédulité de proies faciles, les connexions et les appâts que recèlent les réseaux sociaux et les vidéos nourries de bouillie complotiste et de déliquescence occidentale.
Un embrigadement porté avec conviction par la fulgurante Noémie Merlant et la très convaincante Naomi Amerger, qui sépare un peu plus encore les familles fragiles, qui vient mettre à l'épreuve celles qui sont mieux établies.
Le Ciel Attendra décrit et met en scène le basculement et, en même temps, un retour difficile à la vie "normale" partagé entre résistance quasi sectaire et crises de délire, crises de manque et vide abyssal, comme si la personnalité de l'être cher avait été aspirée dans un trou noir.
Et si le film déploie quelques maladresses en certaines occasions, il réussit cependant l'essentiel : éviter le simplisme et les positions clivantes en jouant la carte d'une approche feutrée mais pour autant sans fard. Qui restitue toute la détresse de parents désemparés, leur impuissance, leur impatience. Les regards hallucinés et haineux, le dédain, les pleurs, les libérations illusoires, les délires de la mission divine, les prières dans la nuit, ou encore les insultes et les réflexions acerbes et violentes lancées pour blesser un peu plus.
Le Ciel Attendra, dans son titre et ses dernières images, recèle une forme d'espoir fragile, de luminosité timide. Mais il restera surtout en mémoire par l'illustration de la plus grande peur d'un parent : ne plus reconnaître, du jour au lendemain, son enfant.
Behind_the_Mask, religion, piège à con.
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Créée
le 20 août 2020
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