A l'époque où Besson faisait encore du cinéma, il a tourné le 5ème élément, un film français dans ses inspirations et son financement, et américain dans son casting et son exécution. Et surtout un film tellement barré et bariolé qu'il demeure encore aujourd'hui une anomalie dans le paysage cinématographique des deux pays.
Mais une belle et heureuse anomalie, car malgré quelques petits défauts et la prestation insupportable de Chris Tucker, cela reste un de mes films doudou, une madeleine de Proust de mon adolescence nourrie à la SF, aux BD franco-belges et aux jeux vidéos. Avec son univers étrange et coloré lourdement inspiré de Moebius, Mézières et Jodorowsky, le 5ème Élément ne ressemble à aucun autre film.
Son identité visuelle, il la doit aux nombreux talents embarqués dans sa réalisation : des effets spéciaux en latex à l'ancienne qui ont étonnamment bien vieilli et de très rares recours à la 3D. Il la doit aussi aux costumes flamboyants de Jean-Paul Gaultier qui confère une identité unique à chacun des protagonistes parés de ses tenues d'un goût certainement très discutable.
Le film se distingue aussi par la musique d'Éric Serra, fidèle acolyte de Besson, qui signe ici l'une de ses meilleures OST. Le casting est tout aussi savoureux, avec un Bruce Willis au temps de sa splendeur, Milla Jovovich dont toute ma génération est tombée amoureux à la sortie du film, moi le premier, et Gary Oldman en méchant chaotique-mauvais archétypal aux punchlines bien senties.
Mais ce qui m'a le plus étonné en le revoyant, c'est à quel point le film est porté par un script très dynamique. On ne perd pas une minute, avec des persos sans cesse en mouvement, des quiproquos, des trahisons, plein de factions qui se tirent dans les pattes, se croisent sans se voir ou se doublent et s'entrechoquent joyeusement.
Alors ce n'est pas très futé et on se serait passé de quelques blagues en dessous de la ceinture (et surtout de Chris Tucker), mais le film dégage une énergie et un enthousiasme comme j'en ai rarement vu depuis.