Un documentaire qui avait tout pour me plaire : j'ai pensé passer ce concours quand je réfléchissais encore à mon orientation ( c'est-à-dire, en d'autres termes, quand la vie avait encore un sens qui rimait avec vocation, passion et animation... il y a bien longtemps !) et je me retrouve aujourd'hui à participer à divers jurys, de l'autre côté de la table, face à des gens d'à peu près cette tranche d'âge (c'est-à-dire encore tout mignons et pleins de rimes riches eux aussi...). Bon, j'admets que c'est longuet par moments, mais c'est finalement assez fidèle à ce que vivent les jurys, dans n'importe quelle filière. A une différence près, qui me fait apprécier mon métier sous un aspect inattendu : je ne juge que des performances et jamais la personnalité des candidats. C'est un soulagement moral non seulement à présent que je suis dans l'évaluation, mais aussi à effet rétroactif, car, en tant que postulante, j'aurais modérément bien vécu un verdict qui aurait porté non pas sur mes compétences mais sur mon caractère... Appelons ça de l'orgueil mal placé, ça vous évitera de le faire, mais quand même : voilà un reportage qui pose finalement une question essentielle, qu'est-ce qu'un artiste ? Et alors là, bonne chance les candidats (et les jurys) ! La note de l'oral final pèse apparemment très lourd en regard de celle de la composition de 7 heures à l'écrit. Et les critères qui rentrent en ligne de compte laissent parfois pantois : un petit accent charmant, une innocence désarmante, un gros côté barré, voire une remarquable difficulté à verbaliser et les jurés s'emballent. Que faut-il privilégier ? Des critères objectifs ou une présomption de génie ? Autant dire que ça s'empoigne pas mal. Comment rationaliser un choix aussi subjectif ? Franchement, ça met un peu mal à l'aise. A la fois, la vie, c'est aussi ça : une rencontre opportune, une impression trompeuse mais décisive... rien ne peut parfaitement nous protéger de ça, pour l'instant. Je ne doute pas que quelque rationaliste effréné viendra nous vendre l'algorithme imparable, mais pour le moment, la navigation à vue dans l'humain reste teintée d'aléatoire et de sentimentalisme. Bon an mal an, le système fonctionne suffisamment pour perdurer, à tort ou à raison. Chacun se fera son opinion. Pour ma part, j'en retiens que la bienveillance n'écarte pas l'injustice, il faudra s'y faire. Et tenter de rester bienveillante malgré tout, malgré le sentiment tenace qu'il faut tout mettre à plat d'urgence et repenser de fond en comble.

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le 22 janv. 2018

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