Grégoire Lecomte (Pierre Richard) est un comédien à la recherche désespérée d'un rôle qu'il voudrait à la hauteur de son talent. Lorsqu'il se retrouve face à un contrat à 10 millions de francs, il ne recule pas ! Ce qu'il ignore, c'est que son contrat de comédien se trouvait dans la pièce à côté. La pièce où il est entré par mégarde était celle d'un parrain de la mafia qui l'a engagé pour tuer une cible...
Il est temps pour moi de retirer ce que j'ai dit en découvrant avec beaucoup de déception La Vengeance du serpent à plumes, même en-dehors de ses Louis de Funès, Gérard Oury est un grand réalisateur de comédies. Le Coup du parapluie pourrait même en faire le Blake Edwards français !
Jusqu'à présent, jamais je n'avais vu le génie burlesque de Pierre Richard aussi bien exploité qu'ici. Il est partout à l'écran ! Ses bras et ses jambes s'étirent comme s'il voulait remplir au maximum le peu d'espace qu'il a pour étaler tout son talent. Il déploie un sens de la gestuelle dont il a certes déjà fait preuve, mais qui est ici rentabilisé à 200 %, c'est absolument prodigieux.
Mais ses partenaires à l'écran ne sont pas en reste, et l'énergie de Pierre Richard se reflète tout-à-fait dans celle de Christiane Murillo et Valérie Mairesse, qui se donnent à fond dans leurs rôles respectifs. Du côté des méchants, on découvre Gordon Mitchell, rare acteur dont la gueule est si impressionnante qu'elle le dispense de jouer quoi que ce soit. Il n'a qu'à montrer son visage, et ça suffit. En face, Gert Froebe nous offre un hilarant numéro d'autoparodie, qui n'a pas fini de me faire marrer (son imitation de la baleine, dur de s'en remettre).
Si Le Coup du parapluie fonctionne aussi bien, toutefois, ce n'est pas tant à cause de ses géniaux numéros d'acteurs que d'une mécanique comique parfaitement rôdée. Tout fonctionne à merveille, du quiproquo initial qui lance toute l'intrigue, d'une rigueur et d'une ambiguïté impressionnantes, jusqu'aux séquences de l'hôtel à Saint-Tropez, sans conteste un sommet du cinéma d'Oury. On y retrouve la patte des scénaristes du Cerveau ou de Rabbi Jacob, et leur goût pour les trajectoires contradictoires, les échanges de McGuffin, les personnages qui se retrouvent au mauvais endroit au mauvais moment à la place d'un autre personnage qui se retrouve dès lors à son tour à un autre mauvais endroit à un autre mauvais moment, l'échange involontaire des rôles, et tout ce qui fait une bonne comédie à l'italienne.
On rit alors plus que ce qu'on espérait devant les déboires du pauvre Pierre Richard, et les micmacs dans lesquels il se plonge lui-même, et dont il sort de la manière la plus extravagante (cette montée d'escalier sous le tapis va me rester longtemps en mémoire !).
Jouant sur tous les tableaux (comédie romantique, film méta, film d'espionnage), Le Coup du parapluie apparaît dès lors comme un film extrêmement complet, qui réussit à nous faire rire sur tous les tableaux, et à déployer une histoire qui ne fait aucun sacrifice. L'intrigue tient debout du début à la fin, sans jamais sacrifier la cohérence du scénario, signe qu'on est bel et bien face à une de ces comédies à l'ancienne, où chaque détail est soigné, pour nous offrir un spectacle qui allie la rigueur et le divertissement. Et Dieu sait qu'il n'y a décidément rien de plus drôle qu'un bordel rigoureusement organisé...