Georges a un rêve, il souhaite être le seul homme à porter un blouson. ll vient juste de se séparer de sa femme, ce n'est pas dit mais on le devine. Alors, crise de la quarantaine et rupture obligent, il s'achète un nouveau blouson, en daim, son nouveau partenaire. Au vendeur, il obtient avec le blouson une caméra qui lui permet d'annoncer son nouveau métier à Denise, interprétée par la brillante Adèle Haenel. À deux, ils tacheront de faire de ce rêve fou un film. Denise voit derrière ce rêve, ce scénario, un sens caché, celui de vouloir se cacher au-dessous d'un apparat. Pourquoi pas. La machine est en marche.
Quentin Dupieux livre avec ce film - qui dépeint un film dans un film -, un vrai tour de force. N'hésitant pas à citer ses inspirations, son homonyme Tarantino notamment, il porte à l'écran un Jean Dujardin barbu (et donc méconnaissable) aux airs de Rick Grimes dans Walking Dead. Dupieux fera sans doute un hommage au surprenant Boulevard de la Mort dans la scène dans laquelle nous voyons l'avant de la voiture, il ne manque que le personnage cartoon de la voiture de Kurt Russell. Et ce film l'est tout autant, étonnant. Ici il n'est pas question de police, de bien ou de mal. Chacun est livré à lui-même et avance selon sa conscience. Georges voulant à tout prix réaliser son rêve s'improvise donc tueur en série dès la première demi-heure. Petit à petit, l'accoutrement du personnage principal s'étoffe : il s'approprie d'abord un chapeau trouvé sur le corps inanimé de l'employé d'hôtel, puis des bottes, Denise lui offre ensuite un pantalon, ce sont enfin des gants qu'il s'offre, accompagné de sa nouvelle amie. Tout cela en daim, bien évidemment.
Notre Indiana Jones de la France paumée ne verra pas son rêve devenir réalité, mais comme tout bon rêveur, il mourra comme s'il l'était devenu. Quentin Dupieux quant à lui porte à l'écran un film étonnant - brillamment écrit, joué et réalisé - tout en restant fidèle aux choix de ses débuts. C'est-à-dire réaliser un film ne nécessitant pas de gros moyens financiers ni d'acteurs nombreux. Il s'impose avec une force encore plus certaine comme le réalisateur qui aura su donner aux objets inanimés une vraie vie dans un film. Chapeau (en daim) à lui.