(Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs" : Takeshi29)
Le départ est une course : issue d’un faux départ, dès la première séquence sur un vélomoteur qui refuse de démarrer, et tendue vers la ligne de départ d’un rallye qui nécessite pour Léaud de posséder une Porsche.
Tous les moyens sont bons, scénaristiques et formels.
Le départ, c’est le prequel de Fast & Furious pour ses séquences de course. De Yamakasi pour l’homme bondissant qu’est Léaud, qui court, saute les rambardes, dérape, et crame –littéralement- la pellicule. C’est aussi un hommage au film muet, à la geste originelle du cinéma, dans l’euphorie soulignée par un freejazz jubilatoire. Ionesco plane sur certaines scènes, où l’on met des saucisses dans les pots d’échappement, où l’on singe les adultes et la société de consommation.
Car c’est bien un film tout entier irradié de jeunesse et de liberté : la ville est un terrain de jeu, les destinées des happenings permanents. Tout semble improvisé, les scènes s’enchainent et dévoilent un monde quelque peu figé, celui des spectateurs souvent vieux (au salon de l’auto ou lors du défilé de maillots de bain), éclaboussé d’insolence insolite.
Dans cette danse urbaine qui n’est pas sans évoquer Tati, les trouvailles visuelles pullulent et la poésie s’invite à l’improviste. On retiendra deux séquences majeures : celle du transport du miroir, qui se brise (un accident de tournage qui mit en difficulté l’équipe tant son budget était serré) et qu’on passe à l’envers pour le reconstituer, et surtout celle du salon de l’auto, parenthèse enchantée qui donne un bon aperçu du film :
https://www.youtube.com/watch?v=OQRZxxuPvZg&feature=youtu.be
(merci à takeshi29 pour le lien)
La frénésie poétique de Skolimowski qu’on retrouvera avec tous les richesses de la couleur dans Deep End quatre ans plus tard dit l’amour, l’adolescence cyclothymique et les fugues rimbaldiennes. Avec Léaud, on tombe amoureux de Michelle, et l’on contemple aujourd’hui avec une tendresse cette nouvelle vague qui, si elle s’est retirée, garde toute sa fraicheur.
De ce regard sur le passé, une question demeure pourtant : qu’est-il advenu de cette solaire Catherine Duport, qui avait déjà partagé l’affiche avec Léaud sur Masculin Féminin de Godard, et ne tournera plus jamais par la suite ?