Blue Scott Down

Si sa carrière jusqu’à Gladiator est unanimement saluée par à peu près tout le monde, Ridley Scott est depuis un sujet de débat somme toute fort épineux, concentrant les passions, dans une dispute atteignant son paroxysme lorsqu’on parle de Prometheus et d’Alien : Covenant, prequels d’Alien polarisant toutes les questions autour de papy Scott. Et Le Dernier Duel, premier long-métrage de Scott sorti en 2021 (puisqu’il y en a deux), n’échappe pas au débat. Véritable four commercial, le film divise, entre ceux qui y voient un vibrant pamphlet féministe à l’esthétique médiévale réussie, et ceux qui y voient un ersatz de Rashomon, trop long, trop répétitif et manquant de vie. Il faut accorder aux détracteurs que ce dernier duel est effectivement un poil trop long, on sent les 2h30 passer, d’autant plus que les séquences remontrées sous un autre angle n’offrent pas vraiment de valeur ajoutée au film : je pense à la scène du viol, qui, même si elle est effectivement beaucoup plus violente la seconde fois, ne laissait tout de même que très peu de place au doute à sa première apparition. Et le fait que le film prenne le parti de dire explicitement que la version de Lady Marguerite est la vérité m’amène à penser qu’il aurait dû mentir ou cacher plus explicitement dans les deux premiers actes, car il se trouve ici dans un entredeux assez désagréable, surtout dans la partie de Matt Damon, très elliptique et pourtant mal rythmée. Tout ceci manque d’une structure à laquelle se raccrocher – le procès eût été un choix tout indiqué. Cependant, en dépit de ses évidents problèmes de narration, le film a pour lui une photo assez sublime, un trio d’acteurs brillants (notamment Driver), ainsi qu’une mise en scène efficace, qui culmine dans ce duel final généreux qui remet en cause la tendance des spectateurs à désirer la violence. Peut-être pas un chef d’oeuvre, mais assurément un film efficace.