« Je veux être le dernier à vous connaître »

Adapter une histoire vraie toute droit sortie du XIVème siècle sous un prisme éminemment contemporain n’était pas une sinécure et avait de quoi nous faire redouter la catastrophe et l’anachronisme total. Mais Le dernier duel parvient à s’extirper de ces travers, et le résultat est plutôt plaisant.

Si le film n’échappe pas à certaines invraisemblances historiques (l’évocation du libertinage ou encore de la peste -qui ne portait pas encore ce nom à l’époque-) le tout demeure crédible, qu’il s’agisse de sa représentation de la société médiévale et de la condition des femmes.
Quelle triste idée néanmoins que ce filtre bleuté constant, qui créé de la distance avec l’époque, contredisant la volonté du film d’évoquer des enjeux actuels.

Le découpage du film en trois chapitres, qui nous présentent respectivement le point de vue des deux hommes, Jacques Le Gris et Jean de Carrouges, superbement interprétés par Adam Driver et Matt Damon -bien que très loin du contre-emploi-, et bien sûr celui de Madame de Carrouges (Jodie Comer, excellente) est assez pertinent et permet d’aborder d’autres enjeux, comme les questions de l’honneur ou encore du viol conjugal, bien que créant une répétition qui en agacera certains (à l’instar des souffleurs exaspérés de ma salle).

Une réalisation habile donc, malgré quelques choix discutables, à l’image de la photographie précédemment évoquée ou du « franglais », certains personnages s’exprimant en français ou avec un accent marqué, ce qui brise la cohérence du cadre. Lorsque l’on fait le choix d’adapter un récit dans une autre langue, il est de bon ton de le faire jusqu’au bout et se passer de ces effets folkloriques qui doivent autant interroger outre-Atlantique que dans nos contrées.

Mais tout cela n’enlève que très peu à la justesse de ce Dernier duel, adaptation réussie et sans doute l’un des films #MeToo les plus pertinents.