CETTE CRITIQUE EST PLEINE DE SPOILS, ALORS SI VOUS NE L'AVEZ PAS ENCORE VU, BARREZ VOUS!
6.6 de moyenne, c'est un blague?! Où est passé votre sens du fun; votre sens de la fête et de la démesure?
Merde! Même moi, je lui avais mis 6 avec un petit coeur, comme pour me dédouaner de mon manque de courage. Après, je lui ai mis un 7 recommandé un peu mou du genou. C'était lâche au fond! A croire que j'ai été remplacé par une saloperie de robot, fauxbot, ou ce que vous voudrez! A croire qu'on à tous été remplacé par des robots, qu'on a tous été Starbucké avec nos notes de pisse vinaigre jamais contents.
Concrètement, on lui reproche quoi à ce film? D'être le moins bon de la trilogie Cornetto? C'est même pas le cas, je le préfère à Hot Fuzz, et objectivement, il est meilleur que Hot Fuzz! Ses thèmes sont plus forts, mieux amenés, c'est un des meilleurs films de SF sorti après les années 2000...
Bon je me rend compte que je prend le truc à l'envers. Je commence par le jaggerbomb avant d'entamer les hostilités à la petite bière qui passe bien. Alors on reprend depuis le début.
The world's end est donc la troisième collaboration au scénario d'Edgard Wright et de Simon Pegg dans leur fameuse trilogie du Cornetto après les excellents Shaun of the Dead, et Hot Fuzz.
La trilogie Cornetto... Rien que le nom est déjà magique. Vous vous souvenez des cornettos? C'était ça qu'on bouffait à l'entracte à l'époque au cinéma; au moment où l'ouvreuse passait directement dans la salle; avant qu'on doive nous servir nous même notre popcorn et nos nachos plein de sauce couleur colorant jaune diarrhée, et qu'on en foute partout, et puis que c'est dégueulasse comme c'est pas permis; avant qu'on marche tous en file indienne; bien gentiment; dans des multiplexes qui se ressemblent tous comme les bars de ce film.
C'était l'époque où quand t'allais au cinéma, t'avais des rituels. Des rituels comme le cornetto de l'entracte. Quand t'avais de la chance il y avait même un rideau devant l'écran de cinéma, et il s'ouvrait avant le film pour te faire pénétrer dans un autre univers, et on était content, heureux même, de voir ce vieux rideau mité s'entrouvrir. C'était presque comme un rite de passage à chaque fois que tu pénétrais dans une salle obscure. C'était avant que tu te tapes des pubs de merde jusque dans cet endroit sacré, ce temple qui renferme les merveilles de l'imagination. Où on te proposait d'être quelqu'un d'autre pendant 1h30, et de vivre des aventures; avant le cinoche aseptisé, lyophilisé, projeté dans des endroits proprets qui ont même plus d'odeurs...à part celui de la sauce nacho peut-être...
Et t'allais voir des films pour passer un bon moment et bouffer des cornettos ou des chocolats glacés comme l'a chanté Eddy.
Ouais, je sais. Vous allez dire que je divague un peu, que je me laisse aller à la nostalgie du c'était mieux avant. Une nostalgie de vieux con. Ben justement, c'était pas mieux avant. C'était plus miteux, le son était parfois à chier, quand t'étais resté 1h30 sur ton siège strapontin que tu devais rabattre pour t'assoir, t'avais mal au derche en sortant, et parfois, t'avais besoin de 5 minutes pour dégourdir tes jambes ankylosées, histoire que le sang afflue à nouveau.
C'était pas mieux avant, mais il y avait de la magie, voir même de l'aventure! Et pas un truc standardisé, fait pour plaire à tout le monde, et donc à personne.
La trilogie Cornetto des petits gars Wright et Pegg, c'est pas standardisé. C'est même tout le contraire. Jusque dans la thématique... Dans chacun des films de la trilogie, le principal thème développé, c'est l'uniformisation.
Dans Shaun of the dead, on montre une population se transformant lentement en décérébrés, faisant tous les mêmes gestes. Dans Hott Fuzz, tous les gens du village se réunissent pour le "bien commun" dans la même idéologie fasciste. Et bien sur, ce world's end, c'est l'aboutissement du truc. Une société ou les gens ont été remplacés par des robots.
Chacun des films qui composent la trilogie est un hommage à un genre donné. Le film de zombie pour Shaun, le cop movie/film d'action pour Hot Fuzz. Dans celui-ci, c'est un hommage à la Science-Fiction paranoïaque du genre l'invasion des profanateurs de sépulture de Siegel (et son remake de Kaufman qui lui est supérieur à mon sens), mais je ne peux pas m'empêcher de penser que Wright avait surtout comme modèle le They Live de John Carpenter.
On sent le fantôme de Big John en train de hurler dans une scène finale qui n'est pas sans rappeler non plus la fin non moins géniale d'Escape from LA. Parce qu'il vaut mieux éteindre la lumière que d'être formaté à l'extrême. Parce qu'il vaut mieux retomber dans le moyen âge que de devenir des robots, des esclaves, que d'être phagocyté par un esprit de ruche.
Que les maitres qui veulent nous faire évoluer retournent chez eux. Comme d'habitude on agira comme des cons, mais on sera libre.
Dans les annales du Disque-Monde, il y a une réflexion du Patricien d'Ankh-Morpok qui convient parfaitement à ce que ce film veut exprimer, et que voici
- 'I'm sure we can pull together, sir.'
- Lord Vetinari raised his eyebrows. 'Oh, I do hope not, I really do hope not. Pulling together is the aim of despotism and tyranny. Free men pull in all kinds of directions.' He smiled. 'It's the only way to make progress.
En plus de toutes ces considérations, The World's end est plein de bagarres ou tu vois des combats en mode catch/kung-fu. Simon Pegg nous fait même quelques mouvements de Drunken Boxing, et Nick Frost m'a même fait penser à un mix de Sammo Hung et d'un catcheur de la WWE par moment (il faut dire qu'il a la carrure).
Et puis, Edgar Wright nous sort un sacré tour de force afin de toujours rester sur le fil de son histoire malgré les tons si différents au sein de son film. Un vrai numéro d'équilibriste, et fait avec panache, et en ne lésinant pas sur les cabrioles, et qui plus est sans jamais se casser la gueule.
Et puis, c'est également touchant cette histoire d'amitié, et cette incapacité d'évoluer du personnage de Gary King; jusqu’à la toute fin, ou on lui propose de redevenir jeune comme il l'a toujours voulu, et de le voir à ce moment là, confronté à ce qu'il cherche, reprendre le cours de sa vie en arrachant la tête de ses rêves de jeunesses incarné devant lui par son alter-égo exo-robotique.
Mais ce qui achève de me convaincre, c'est ce discours de fin! Refusant la conformité, mais également plein de cynisme et d'ironie sur l'humanité, et pourtant, porteur d'espoir et de confiance en l'homme. Cette charge pleine de mauvais esprit à l'encontre du Network, le réseau, le village global. Ce refus de ce qui nous consume à travers ce qu'on consomme.
Ouais... Un bon gros doigt d'honneur à tous les maitres qui voudraient nous déshumaniser, délivré avec le sourire par la joyeuse bande de vieux gosses qui nous ont enchantés avec ces trois films, dont The world's end est l'aboutissement, et donc la clôture thématique d'une des meilleures "trilogies" qu'il m'ait été donné de voir.
"Hey it is our basic human right to be fuck ups. This civilization was founded on fuck ups and you know what? That makes me proud!"
Donc pour tout ça, 6.6, c'est carrément se montrer pingre.
Après tout ça, je devrais lui foutre un dix, histoire de faire monter la moyenne. Mais bon, je peux pas lui mettre plus que ses modèles, alors ce sera la note que je donne à ce que je considère comme un classique du genre, car c'en est un.
Et même si le vent emporte les emballages de cornetto à la fin du film , signifiant la fin d'une ère , on espère que la joyeuse bande se réunira à nouveau pour notre plus grand plaisir.