Le cinéma russe est singulier. Et Le Dernier voyage de Tanya en est une nouvelle preuve. Aleksei Fedorchenko ne vous dit peut-être rien mais c'est un cinéaste russe rempli de talent. A travers l'histoire d'une ethnie aujourd'hui oubliée vivant dans le Nord de la Russie, les Mériens, Fedorchenko évoque le passé et le présent, la place des ethnies et des traditions au sein de notre époque.
Tanya est décédée. Son mari et son ami partent pour un dernier voyage effectuer le rituel de départ de la femme. On ne sait pas les causes de son décès, mais ce n'est pas le plus important. C'est une sorte de voyage initiatique que le spectateur va réaliser avec les deux amis. Un voyage où le silence pèse bien plus que les mots.
Techniquement, j'ai trouvé le film particulièrement réussi. Fedorchenko filme lentement les choses, très peu de cut, il y a surtout une volonté de remplir ses plans de sens, de symboles et de vie. Il se passe toujours quelque chose à l'image. La photographie est superbe. D'une certaine manière, le film rappelle formellement Le Retour de Zviaguintsev.
Mais aussi sur le fond avec ce côté initiatique dans le voyage et ces longs silences. Le film évoque donc le poids de la société d'aujourd'hui qui "tue" les minorités ethniques, les langues qui disparaissent, des gens appartenant à ces minorités qui se conforment à la généralisation de la société. Oui ce rituel parait étrange tout comme celui d'accroches des fils aux poils pubiens de la future mariée que le mari dénouera par la suite.
Personnellement, j'ai beaucoup aimé ce voyage, cette culture différente qui est montrée. Différente même pour les Russes eux-mêmes car les Mériens étaient essentiellement un peuple originaires des contrées finno-ougriennes plutôt que Slaves.
Un voyage à faire en compagnie de ces deux hommes pour un dépaysement mélancolique garanti.