-Je viens de voir le plus beau film du monde ! Je ne connaissais pas le cinéaste je ne me souviens pas d'avoir vu des choses de lui, soit, j'ai vu un chef d'œuvre absolu, c'est un film historique à la structure très classique, mais par contre, c'est beau, beau putain, beau, grand ! Quelle superbe envie de bien faire les choses ! C'est un film sur le contraste entre d'un côté le démon du pouvoir de l'argent et de la conquête (L'Emir, qui n'aime que sa force et son plaisir; le cheikh fanatique et ses disciples on ne peut plus sérieux, purement méchants et désireux du pouvoir et de troubles), et de l'autre la douceur de la sagesse de la beauté et de la religion (Averroès, dont tout le monde veut coûte que coûte empêcher ses livres d'exister, le chanteur, la gitane, les deux fils de l'Emir après que le "mauvais" des deux se soit repenti..), en somme une lutte entre l'Ange et le Démon, la lutte éternelle, la vie quoi, la vraie vie. "Que chacun choisisse son camp", semble susurrer très gentiment le film.
-Techniquement c'est parfait, la direction d'acteurs est SUBLIME, les cadres sont bien, le montage est tranquille et charmant, mais plutôt rapide quand même, superbement équilibré en tous cas, bref, il y'a là une telle inspiration, une telle maîtrise absolue de l'âme humaine, qu'on a l'impression que ce n'est même plus du cinéma, on a du mal à revenir en arrière et se dire que "ce n'est que du jeu", tellement l'impression de vrai est absolue.
-Il y'a plein de phrases "marquantes" comme ça, comme le dit Averroès dans le film : "La raison est l'amie et la sœur de la loi Divine, et, à chaque fois qu'il y'a entre elles des conflits de l'inimitié ou de l'hostilité, alors c'est qu'il y'a là-dessous, de la part de quelqu'un, quelque invention bien sournoise et malintentionnée...", ou bien encore "Les choses ne sont jamais aussi simples", ou bien la gitane qui dit : "Mais, Dieu est l'amour même", ou encore ce dialogue entre Averroès et l'Emir :
-Emir : "Tu me hais"
-Averroès : "Non, je ne hais que l'ignorance et la vanité."
-Emir : "Que veux-tu, c'est ça, la politique."
-Averroès : "Toute politique sans morale est vouée à l'échec."
-Emir : "Mais réfléchis-donc ! C'est la réalité qui commande !"
-Averroès : "Non, c'est la conscience qui commande."
-Emir : "Sache que si je ne te respectais pas encore un peu, je te détruirai."
-Averroès : "Alors détruisez-moi, plutôt que de détruire la nation avec vous."
On peut citer plein de choses tout à fait charmantes, essentielles, plein.
-Le film est aussi une "alliance" nécessaire entre l'islam et le christianisme, le personnage du chrétien aux yeux bleus, Joseph, qui vient chercher le savoir auprès du musulman Averroès pour le transmettre plus tard à son peuple.
-Le dernier plan du film, Averroès, triomphant, jette son livre au feu. Car, au fond, peu importe la culture les livres tout ça, peu importe, ce qui compte c'est les faits, uniquement les faits, la beauté du geste, et qu'est-ce qu'on en tire vraiment, de tout ça.
-C'est seulement le premier film de lui que je vois je crois de cet artiste puissant, je dois vraiment en voir d'autres en espérant découvrir d'aussi jolies choses; car ce film est probablement un des plus grands films que j'ai vu de ma vie, je n'en reviens toujours pas, mon petit coeur n'en pouvait plus de toute cette charge de beauté, de justesse, de grandeur, j'ai pleuré d'émotion, et ça ne me choquerait pas si ce film faisait parti d'un top-10 all-time par exemple, bien au contraire, ça mériterait, ooooh que ouais !!
-Pour faire un film pareil, pour avoir tant compris Averroès, il faut bien que ce Youssef Chahine ait vécu, comme Averroès, dans les déchirements de la divine et si pure, si pure, contradiction. Ah c'est pas Kechiche ce Chahine, ah ça non, ça non.... Je note qu'il faut que je vois d'autres choses de lui, absolument !!!!