"The Bellboy" fut le premier film pour lequel Jerry Lewis passa derrière le caméra. Il a également écrit et produit le film, et en est évidemment l'acteur principal.
Le film apparait ainsi comme un accomplissement pour ce "dingue de cinéma" qui ne rêvait que de pouvoir contrôler entièrement son film. Mais il montre aussi quelques faiblesses, probablement dues à un manque d'expérience...
Jerry Lewis, pour qui les gags étaient l'essentiel d'un film, a ainsi écrit un film sans véritable histoire ni trame narrative. C'est d'ailleurs ce qui nous est dit dès le prologue du film, que fit rajouter Jerry Lewis en réponse à ses collaborateurs du studio Paramount qui trouvaient qu'une heure de gags sans queue ni tête était indigeste ; si on est prévenus à l'avance de cette particularité, il semblerait que la pilule passe mieux...
Le film fut tourné dans un vrai hôtel, que Jerry Lewis a visité pour y imaginer des gags. La fameuse technique du "lâcher de singes"...
Le problème que rencontrent souvent ce genre de films à sketches est une certaine inégalité de qualité, qui finit par faire baisser le rythme. Ainsi, si certains gags sont très bons (le bronzage partiel, le régime express, les dizaines de personnes sortants de la voiture...), d'autres se révèlent poussifs voire donnent l'impression de cheveux dans la soupe (l'avion, le golf, les chiens...).
Ce qui fait le lien entre toutes ces scènes est bien-sûr la figure de Jerry Lewis, qui porte le film par sa grande énergie, toujours contrecarrée par sa bêtise et sa maladresse (parfaitement résumées en début de film par ses hésitations dansantes), même si, classique du burlesque, il arrive au contraire parfois à accomplir des prouesses miraculeuses.
Par contre, les allergiques aux grimaces de l'acteur auront certainement du mal à supporter le film, étant donné qu'elles sont encore plus présentes que d'habitude. Ce bellboy est en effet quasi muet, s'exprimant surtout par sifflements (et par grimaces, donc, qui marquent surtout son incompréhension ou sa gêne).
Ce mutisme pourrait être vu comme un hommage au cinéma burlesque de la grande époque, et surtout à l'acteur Stan Laurel (dont le personnage de Jerry Lewis reprend le prénom). On sait en effet que le film lui est plus ou moins dédié, et quelques clins d'oeil sympathiques parsèment le film.
D'ailleurs, le sous-texte du film est finalement peut-être plus intéressant que le film lui-même, quand on s'arrête par exemple sur les figures de double développées ici et là (qui permettent également à Jerry Lewis de se moquer de son statut de star), comme pour mieux souligner que Jerry est maintenant autant auteur qu'acteur. C'est ainsi une des lectures possibles du meilleur gag du film, celui où Stanley le bellboy se rêve chef d'orchestre.
Mais ce gag est également beau car il symbolise l'imagination au pouvoir, la toute puissance des gags cartoonesques, déformant l'espace-temps et allant contre les lois logiques.
Jerry Lewis était véritablement en train de conquérir sa liberté...