Synopsis : Le film s'ouvre sur une opération de spéculation boursière magistralement orchestrée par le docteur Mabuse (1re séquence). On retrouve ensuite le docteur Mabuse sous son identité officielle donnant une conférence sur la psychologie (2e séquence) puis le film relate ses exactions et les efforts du procureur von Wenck pour y mettre un terme. Le titre de joueur est lié à un lieu central de l'action, un cercle de jeu clandestin où le docteur Mabuse croise une bourgeoisie désœuvrée et exerce ses pouvoirs d'hypnose et de suggestion. C'est notamment là qu'il rencontre le comte Told et que, épris de la comtesse, il va s'acharner à précipiter sa déchéance.
Les 4h30 de film peuvent vous effrayer, et c'est tout à fait normal. Cette durée est en réalité issue d'une passion qu'avait Fritz Lang pour les "sérials", ces films à rallonge narrés en épisodes qui donnaient lieu aux premiers films policier (notamment "Les Vampires" dont je vous invite à lire ma critique). Et on remarque bien l'influence, certaines séquences sont fortement similaires aux Vampires de L. Feuillade. Et rassurez-vous, le film est divisé en deux parties, elles-mêmes subdivisées en plusieurs actes.
Et malgré ça, ce film regorge de folies pures ! Le film dénonce, dans sa thématique, l'Allemagne bancale de la République Weimar et Fritz Lang dépeint tous les défauts de ce Berlin des années 20, pour tous les grades. En quelque sorte, Mabuse est un précurseur au personnage d'Hitler dans son autoritarisme extrême, cette soif de dominer et de répandre son pouvoir. Par ailleurs, ce film sous le IIIe Reich, est considéré comme un film juif. Ce qui est intéressant, c'est vraiment de sillonner de maison en maison pour voir l'époque contemporaine du réalisateur (aristocrates, ouvriers, etc.).
Et tout ça dans une mise en scène extraordinairement réalisée ! Il y a un rythme effréné avec des valeurs de plans conséquentes. Pour (l'une des) premières fois, les gros plans ou plans d'inserts ne sont pas là pour annoncer un élément particulier mais ont un vrai sens narratif ; les plans se répondent entre eux, ainsi que les scènes. Les cartons de dialogue amènent de la tension, ainsi que la musique en totale symbiose avec l'atmosphère du film.
Autre que la mise en scène, il sera important de noter que toutes les techniques déjà évoquées sont utilisées dans le film : surimpressions, traveling, jeu d'iris, etc. Et apportent également un poids au récit, une réelle conséquence de leur utilisation.
Bien qu'allemand, Fritz Lang ne se revendique pas comme porte-parole expressionniste bien qu'on peut y retrouver quelques similitudes : notamment les traits sur-maquillés des protagonistes (surtout leur regard) et le jeu de lumière provoquant un large contraste.
Honnêtement, ce film se regarde tout seul par sa mise en scène et son montage, remarquablement exécuté et même précurseur. Le rythme vous entraînera dans l'histoire, sordide et captivante de ce malfrat Mabuse et vous fera oublier le temps écoulé.