Surprenant!

J'ai lancé ce petit film "au pif" sans savoir à quoi m'attendre et quelle fut ma surprise lorsque j'ai constaté qu'il s'agissait d'un film de genre italien doté d'une qualité visuelle similaire aux productions américaines!
"The nest" ("Le domaine" en français) est en effet à la fois intelligent, original et réussi visuellement, changeant ainsi des standards habituels "horrifiques" qui peinent à renouveler le genre, usant généralement de clichés ou d'effets de style vus et revus maintes fois au cinéma.
Ce film italien tend toutefois davantage du mystère que de l'horreur à proprement parler, les personnages se retrouvant cloîtrés dans leur domaine afin de se préserver d'une menace extérieure dont nous n'avons pas connaissance.
La mise en scène parvient admirablement à nous faire ressentir ce sentiment d'enfermement et interroge le spectateur sur les notions de liberté et de libre arbitre, plus que jamais d'actualité dans un contexte de (dé)confinement.
Le point de vue du spectateur sera ainsi celui du personnage principal, un enfant sur chaise roulante (Samuel), protégé du monde extérieur à l'abri du domaine mais s'interrogeant de plus en plus sur sa propre condition jusqu'à se rendre compte que sa vie n'est qu'un immense mensonge.
Sa mère (matriarche glaçante des lieux) fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire croire à son enfant qu'il n'existe rien en dehors du domaine et imposera des règles de vie strictes afin d'empêcher toute tentation ou préoccupation qui ne serait pas en lien direct avec l'entretien du "nid".
Ces fondements vont être remis en question par le personnage principal avec l'apparition d'un nouveau protagoniste en cours de film, une ado recueillie par le domaine (Denise), qui, par sa seule présence en ces lieux, prouve à Samuel qu'il existe bel et bien un "autre monde" à l'extérieur des murs.
Les sentiments éprouvés par les personnages sont alors subtilement mis en scène, Samuel étant forcément attiré par la nouvelle "résidente", lui qui n'a jamais pu bénéficier d'une présence amicale au sein du domaine, son seul confident étant jusqu'alors ce robot en plastique à qui il s'adresse au début du film.
Le spectateur craint alors la réaction de la mère, forcément jalouse, car possessive et surprotectrice, du rapprochement entre Samuel et Denise, percevant ainsi cette dernière comme une intruse néfaste pour la sécurité de son fils.
Tout l'intérêt du film repose ainsi sur les rapports entre les personnages et sur l'atmosphère de mystère qui plane au dessus de cet étrange domaine.
La mise en scène, à la fois subtile et maîtrisée, la photographie de qualité ainsi que l'interprétation brillante des acteurs (la mère notamment, suscitant l'angoisse sans avoir besoin de "surjouer") prouvent que ce réalisateur possède indéniablement quelque chose, un savoir faire et une vision personnelle, ce qui est revigorant au regard des productions actuelles, souvent vulgaires et décérébrées (Blumhouse...)
Je regrette seulement quelques longueurs inutiles, des petites incohérences (qui est allé accrocher la corde sur la branche de l'arbre à 10 m de hauteur? ...), ainsi qu'un "oubli" curieux dans le scénario: en effet, le docteur (fou) du domaine administre une dose d'un liquide étrange tous les jours dans les jambes de Samuel.
Cependant, une scène nous fait comprendre que le médecin n'a plus de liquide, Samuel parvenant dès le lendemain à bouger légèrement son pied, révélant ainsi au spectateur que la paralysie du personnage est fictive et entretenue pour qu'il ne puisse pas s'enfuir et quitter les lieux.
Seulement ça ne sera plus jamais montré ou exploité par la suite, Samuel s'échappant finalement d'une autre manière et ne recouvrant ainsi jamais l'usage de ses jambes.
Je pense ainsi que le réalisateur a changé d'avis en cours de tournage (ce n'est bien sûr qu'une hypothèse), car il m'a semblé très étrange que cette piste ne soit pas développée par la suite, rendant donc la scène de la piqûre et le constat du manque de liquide totalement inutiles.
Bref, ce ne sont que des détails (je suis pointilleux...) qui ne pénalisent en rien l'ensemble du film, qui reste à mon sens original, inventif et de très bonne facture.
Je vous conseille donc de le voir les yeux fermés! (Hum...)