Le ton est donné dès la scène d'ouverture. Spectateur, enfile ton imper, ton chapeau et prépare-toi à prendre ton temps. Ne t’arrête à ce qui paraît évident et jette de temps en temps un petit coup d’œil par dessus ton épaule, on ne sait jamais. Tu vas découvrir ce petit monde mal famé qu'est la banlieue, ses terrains crasseux qui bordent les voies ferroviaire assourdissantes et ses habitants, tous des voyous. Vous comprendrez cette dernière phrase comme vous voudrez.
Véritable projection interne du cinéaste (s'il existe un terme technique correspondant, je suis preneur), Belmondo alias Silien, au delà de la lenteur, met en scène avec minutie et méthode pour se jouer d'à peu près tout le monde. D'ailleurs tout le monde va en prendre dans la tronche : policiers, femmes, truands. Personne n'est épargné et Silien nous convainc même de n'avoir au fond aucun ami. De toute façon, un mouchard peut-t-il vraiment avoir des amis ?
Une scène centrale du Doulos m’a marqué. Lorsque le commissaire Clain, qui est une véritable machine à parole car il est bien le seul à désirer ouvertement savoir la vérité, et ses deux inspecteurs tentent de convaincre notre Doulos de continuer son travail d'indic. La façon dont ils gravitent autour de lui, comme des petits anges ou démons qui titillent sa conscience est remarquable.
Mais pour garantir le succès de son plan, il ne peut se fier à personne. Pas au « milieu », surtout avec ces histoires de truandeurs de truands, et surtout pas aux flics qui se disent amis de ses amis. Car la réussite d'un plan d'apparence bien préparé n'est pas assurée sans une concentration à toute épreuve, et c'est pourquoi les personnages sont presque tous peu causants, toujours dans leur non-dit pour cacher leur intention jusqu'au dernier moment.
Tant mieux, ça nous permet d'apprécier ce fond de jazz...