Je suis tombé par hasard sur ce film sur internet, où j’avais pu lire la description. Un film uniquement tourné avec des marionnettes, ça m’avait tout de suite intrigué !
Je fus agréablement surpris par la façon dont les créateurs ont géré le concept, sachant que les mouvements et les expressions des personnages allaient être forcément limités. Mais la réalisation a su aisément compenser ces limitations. Mieux encore, loin d’être un obstacle, cette caractéristique particulière est devenue l’une des forces du film. Les créatures de cet étrange monde possèdent tous des fils qui partent très haut dans le ciel, dont un fil de vie, qui conduit à la mort de la personne s’il est coupé. Une grande vulnérabilité donc, d’autant qu’il suffit d’un obstacle en hauteur pour restreindre leurs mouvements.
Un concept qui n’est pas sans dégager une certaine poésie. Comme lors de la magnifique scène de la naissance, quand une créature en bois inerte se lie à des fils qui tombent du ciel ; un ancien champ de bataille où reposent des centaines de guerrier, les fantômes de leurs fils encore visibles; la prise de conscience, sous une pleine lune, par le héros des connexions qui unissent chaque créature aux autres.
L’histoire aurait pu être simpliste et reposer principalement sur l’idée originale, mais il n’en est rien. Sur une trame en apparence classique, un frère malfaisant qui espère usurper le trône de son frère en se débarrassant de l’héritier légitime, perpétuer la guerre là où d’autres rêvent de paix, le scénario va se révéler plutôt intelligent.
En effet, Hal, l’hériter du trône d’Hébalon, ressent comme tout son peuple de la haine envers les Zeriths, leur ennemi héréditaire et assassins présumés de son défunt père. Parti dans une quête vengeresse, il va découvrir en chemin des vérités dérangeantes sur son peuple et son père qui vont profondément bouleverser ses convictions, réalisant que les méchants ne sont pas ceux qu’il croyait. Mais pendant ce temps, son oncle Nézo ourdi un complot pour se débarrasser de lui en menaçant ses proches. Sa récente ouverture d’esprit suffira-t-elle à convaincre les Zeriths, menacés par les agissements de son peuple et persécutés depuis des générations, de lui faire confiance ? Où la guerre est-elle inévitable ?
Cette histoire de tragédie antique, avec des thèmes universels de paix et de guerre, de justice et de vengeance, de vie, d’amour et de mort, suscite facilement l’adhésion.
On peut regretter toutefois une fin un peu trop rapide qui ne montre pas assez les conséquences des derniers événements, et relativement prévisible, qui contraste un peu avec le reste du film. Une fin quelque peu « facile » mais pas heureuse pour autant…
« Le fil de la vie » est donc un film éminemment atypique. Et si certains pourraient trouver un certain côté convenu malgré une histoire qui évite le manichéisme, l’originalité du format et sa maîtrise pour en dégager des notes poétiques devraient largement compensée.
A l’heure de nos sociétés sans fils, ce film peut rappeler que nous sommes tous reliés les uns aux autres par des liens, même s’ils invisibles, et si nos fils de vie ne sont pas aussi facilement tranchables, ils n’en restent pas moins fragiles.