L'étonnante trajectoire des troisièmes volets souvent ballottés entre respect des codes et soif de renouveau reflète une prise de risque des studios associée à l'irrésistible tentation de dupliquer l'original. Le flic de Beverly Hills 3 s'apparente à un authentique cas d'école à la fois passionnant dans son désir de recontextualiser "les années fric" dans les nineties et par-là même de poursuivre ses thématiques liées au capitalisme. La rupture des classes et l'opposition des quartiers agencées par Martin Brest puis le rêve américain maquillé en western républicain façonné par Tony Scott laissent place à la facette proprette, ludique et (en apparence) bienveillante des parcs d'attractions. Ingénieusement compartimenté, ce volet réduit son champ d'action, se conceptualise, prolonge ses thèmes sur le pouvoir de l'argent, tend à nouveau la main à Billy Rosewood puis reprend l'idée de la vendetta du premier volet. John Landis, élu maître d'œuvre et dont le crédit artistique n'était pas encore si éloigné élabore le tout comme au temps de sa superbe.

Retour à Detroit pour Axel Foley accompagné de quelques acolytes pour une mission destinée à surprendre un gang de voleurs de voitures de sport. L'identité visuelle tend à retrouver le galbe de l'original. Un ratio en 1:85 cinegiquement moins solaire et une photographie aux accents de métal et contrastée dans "le moule tayloriste" de l'actioner moyen. Si l'effort plastique contente la majorité, Axel Foley ne pétille plus à l'oreille et perd de son aura à mesure que le métrage s'enfonce dans les galeries de Wonderworld. Cette énergie positive qui s'écoule du corps de Foley, c'est "sa valeur ethnique ajoutée". Une vertu acquise dans la rue à force de galères en tout genre. Eddie Murphy oublie ce qui fait l'essence de son personnage et sa pointe essentielle de subvertion. "Le flic de Beverly Hills s'inscrit dans l'inconscient collectif comme un paradoxe: "Un flic noir à Beverly Hills vraiment ?" C'est une marque déposée, une image subliminale et chaque spectateur sait que ce représentant de l'ordre use de sa volubilité comme un écran de fumée envers une société blanche anesthésiée par sa condition. Comment ce flic déraciné peut-il alors tirer son épingle du jeu dans un environnement ouvert à tous sans exception? On le sait le capitalisme n'a pas de couleurs à partir du moment où il y a un portefeuille près du coeur. L'irrésistible pouvoir de séduction black n'a aucune emprise puisqu'elle n'a plus lieu d'être. Foley traverse l'écran sans panache, sans résistance dans un environnement aseptisé. Il ne reste de cette affaire qu'un décor de parc supposé faire illusion. Une simple attraction du samedi soir... Dévitalisé, le troisième volet aurait pu se reposer sur la dynamique du duo Taggart/Rosewood, buddy movie d'arrière plan mais élément moteur essentiel pour mettre en valeur Foley. Là encore, la carence affective des deux comparses dûe à l'absence John Ashton handicape sérieusement le capital sympathie.

Le flic de Beverly Hills 3 conclue le troisième acte d'une collaboration entre Landis et Murphy. Dépouillé de sa substance politique, le métrage subit encore aujourd'hui les affres de l'indifférence et nous, spectateurs impliqués, ravivons le souvenir d'un petit afro démerdard à la langue bien pendue se faisant passer pour un contrebandier de cigarettes.

critique Le flic de Beverly Hills: https://www.senscritique.com/film/le_flic_de_beverly_hills/critique/57494549

critique Le flic de Beverly Hills 2 https://www.senscritique.com/film/le_flic_de_beverly_hills_2/critique/56446702

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le 10 juin 2024

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