Un foisonnant récit d'émancipation qui entremêle une iconographie assez autoreferentielle (notamment Princesse Mononoke pour ses prismes bestiaux et féministes d'un côté, Mon voisin Totoro pour ses créatures enfantines et sa réminiscence d'un paradis perdu de l'autre côté) à des références plus hexagonales (on songe beaucoup au Roi et l'oiseau de Paul Grimault ou encore à Enki Bilal pour son univers rétrofuturiste/cyberpunk).
Ce qui ne l'empêche pas de s'en démarquer par des dérivations scénaristiques qui prennent à revers les modèles cités pour construire un panégyrique très symboliste ou le signifiant diffère régulièrement du sens qu'ont pourrait plaquer sur ce qui est offert à notre regard. C'est sans doute l'aspect qui rebutera le plus le spectateur non averti, car la complexité des nombreux arcs narratifs ébauches par le scénario nous perdent parfois dans des divagations peu intelligibles.
C'est paradoxalement cet eparpillement du récit qui exige une attention toute particulière à l'environnement ludique entourant les protagonistes. Tel élément du décor renvoie à une féerie joyeuse et optimiste, tel autre à des cauchemars traumatiques prenant sa source dans une imagerie historiquement meurtrière. En sorte que des forces contraires créent la matière organique d'un conte malicieusement sournois.
Chacun sera libre d'interpréter les différentes situations qui s'arriment à nos sens car le film se vit émotionnellement plus qu'il ne s'analyse intellectuellement. Myazaki est certainement inspiré par une matière analytique protéiforme qui lui permet de citer des penseurs autant hétérogènes que antinomiques afin d'accéder à un processus le plus universel possible.