Difficile de ne pas voir dans le Garçon et le Héron (titre français d'ailleurs très mal trouvé, c'est assez scandaleux en 2023) un condensé de la riche filmographie de Miyazaki et, plus généralement, du studio Ghibli. L'environnement d'après-guerre rappelle énormément Le Tombeau des lucioles, le jeune garçon portant parfois fièrement la même casquette militaire. La déambulation du héros dans un monde fantastique fait écho au célèbre Voyage de Chihiro. Les thèmes majeurs de ses films, l'environnement, la guerre, le deuil, l'enfance, la monstruosité, le symbolisme résonnent aussi dans celui-ci. Alors, qu'est-ce qui est vraiment différent ? Comment se renouveler sans se dénier ?
Déjà, un héros masculin n'est pas si fréquent dans un film de Miyazaki, même si les véritables héroïnes restent féminines. Il s'engage dans la construction d'un monde proprement fantastique, pas seulement symbolique, où le temps a une importance clef, ce qui est assez neuf dans les thèmes traités et rappelle d'autres anime de ces dernières années (Your Name). mais Le Garçon et le Héron est surtout le premier drame familial du maître. L'épopée fantastique n'a jamais été autant explicitement un prétexte pour parler d'émotions bien réelles : le deuil de la mère, l'acceptation que la vie continue et change, la maladresse de parents et beaux-parents… Cette conjonction des deux mondes, qui pour une fois laisse assez peu de place à l'interprétation de la trame principale, est superbement réussie. Tout comme l'est l'animation, où le talent de Miyazaki s'allie à la perfection aux nouvelles technologies, aboutissant à des scènes à couper le souffle, comme celles de l'incendie qui sont bluffantes.
Le Garçon et le Héron est un bon Miyazaki, mélange d'aventure captivante et d'émotions fortes, même s'il n'atteint pas la subtilité symbolique de ses illustres aînés.