Alors que le studio Illumination Entertainment semble actuellement se reposer sur ses lauriers en ne proposant que des suites depuis Moi, moche et méchant 3 (on attend prochainement Comme des bêtes 2, Les Minions 2 et Tous en scène 2). C’est pour cela que voir Le Grinch débarquer au milieu de tous ces projets commerciaux pouvait apporter un petit vent de fraîcheur. Certes, adapter ce livre pour enfants n’est pas une première (Ron Howard s’y était déjà attelé via un film live avec pour vedette Jim Carrey) et le studio s’est déjà aventuré dans l’univers du Dr Seuss en 2012 avec Le Lorax. Autant dire que, quelque part, Illumination a plutôt choisi la facilité pour son nouveau projet original. Mais une facilité qui pouvait valoir quelque chose entre les mains des créateurs des Minions, ces derniers pouvant apporter leur folie, leur créativité cartoonesque pour en livrer une version idéale en cette fin d’année 2018. Et honnêtement, j’en attendais un peu quelque chose de ce Grinch en animation. J’espérais passer un agréable moment et retrouver mon âme d’enfant. Malheureusement, Le Grinch se présente comme le point culminant de cette maladie qui frappe le studio depuis un bon moment : la paresse.
Oui, dès lors que le succès a souri à Illumination, tous leurs projets ont fait preuve d’une fainéantise non dissimulée. Les Minions ? Un spin-off qui usait avant toute chose de la notoriété de ses célèbres gélules jaunes sans pour autant casser la baraque. Comme des bêtes ? Un ersatz de Toy Story avec des animaux domestiques qui n’allait pas bien loin question humour et scénario. Tous en scène ? Un film musical qui ne comptait que sur sa playlist et rien d’autre pour exister. Moi, moche et méchant 3 ? Comme Les Minions, un opus qui s’est reposé sur les lauriers de ses prédécesseurs, ne proposant rien de neuf dans la saga et n’innovant jamais. Bref, une fainéantise d’envergure qui, pourtant, se montre des plus lucratives quand on s’arrête quelques instants sur les recettes de chacun. Pourquoi se prendre la tête quand on peut réussir sans se forcer ? C’est un « concept » que semble avoir compris Illumination et que le studio applique à la lettre avec Le Grinch. Le problème est que nous ne sommes désormais plus dupes, et que j’en ai marre que nous soyons pris – spectateurs, enfants, adultes – pour de parfaits abrutis.
Alors oui, Benedict Cumberbatch semble s’amuser comme un petit fou (tout comme Laurent Lafitte pour la VF) et avouons que c’est plutôt communicatif. D’autant plus que le comédien parvient toujours à nous charmer avec chacune de ses performances vocales. Oui, même avec un budget réduit par rapport à la concurrence (soit 75 millions de dollars, comme Tous en scène), le long-métrage arrive à se montrer à la hauteur des standards actuels. Notamment avec certains rendus graphiques pour le moins alléchants, comme les poils du Grinch ou encore ces paysages qui se veulent grandioses, ludiques. Et oui, le scénario reprend l’intrigue principal du conte et n’oublie pas de mettre en avant les messages de ce dernier pour les plus jeunes (les valeurs de Noël, les méfaits de la solitude…). Mais ce n’est que le strict minium ! Pour sortir du lot, il aurait fallu donner une énergie folle à l’ensemble. Une magie qui s’accorde avec la période évoquée dans l’histoire. Et surtout assumer l’aspect cartoonesque tant mis en avant dans la promotion. Mais non, rien de tout cela n’a été fait pour rendre le tout appréciable…
À trop jouer la carte de la fainéantise, l’équipe du film gâche le potentiel de ce dernier et ce sur divers points. Bien loin de l’esprit Lonney Tunes que nous aurions dû avoir (avec des situations à la Bib-Bip et Coyotte, les gagdets utilisés par le personnage…), on se retrouve avec un enchaînement mal rythmé de gags éculés au possible, qui ne font plus du tout mouche même sur les plus jeunes (comme se prendre un arbre en pleine course). Avec une intrigue et des décors aussi farfelus, nous avons droit à des personnages au charisme et à la folie minimalistes, qui ne sont jamais hauts en couleurs. Plutôt que d’aller à fond dans la vacherie typique de son anti-héros éponyme, ce dernier se révèle être beaucoup trop gentillet et faussement méchant. De la part d’un conte de Noël, la magie n’est jamais présente. Pour certains passages qui se veulent émouvants à la manière d’un Pixar, Le Grinch n’a pas le savoir-faire pour nous titiller la corde sensible, ces passages étant beaucoup trop fades pour réellement toucher (sans compter un narrateur inutile et agaçant qui vient tout gâcher). Et surtout, pour un film d’animation signé Illumination Entertainment qui propose généralement des titres énergiques, nous devons nous contenter d’un titre quelque peu mou du genou et ennuyeux.
Mais bon, j’ai encore beau critiquer la paresse si caractéristique du studio depuis quelques temps, le succès sera encore au rendez-vous pour Le Grinch. Et pour cause, à l’heure où ces lignes sont écrites, le film affiche déjà près de 470 millions de dollars de recettes mondiales. C’est pour le moment encore en-dessous des scores de Comme des bêtes et de Tous en scène, mais suffisant pour dire que le long-métrage fonctionne. Et c’est navrant… Car avec un tel constat, Illumination va poursuivre sur cette voie et nous offrir de nouveaux films qui ne se foulent aucunement. Si vous voulez vraiment emmener vos enfants voir un projet qui en vaille la peine, tourner vous vers le cinéma japonais (Miraï, ma petite sœur) ou bien français (Astérix : le Secret de la Potion Magique). Là, nous avons des titres travaillés, bien plus méritants que ce divertissement low cost, qui n'a rien à envier à la version de Ron Howard.
Critique sur le site https://lecinedeseb.blogspot.com/2019/01/rattrapage-2018-le-grinch.html