Depuis quelques semaines, je me suis préparé à revoir Valhalla Rising.
Il était là, dans mes fichiers d'ordinateur, attendant que j'appuie sur le bouton play.
Un de mes éclaireurs (Truman, pour ne pas le nommer) m'avait prévenu sur un statut qu'il y avait peu de chances que ma note change si le premier visionnage n'avait pas fait son effet sur moi…
Il avait un peu raison, parce qu'il y a des choses dans ce film qui persistent dans un sens et qui ne m'atteignent jamais, qui ne font que m'effleurer du regard ; je ne suis pas agacé, ni ennuyé, par le cheminement que suivent les personnages. Simplement, cela ne me convient décidément pas.
Ce n'est pas la lenteur du récit, ce soporifisme constant, ce minimalisme percutant et encore moins l'absence de longs dialogues qui m'irrite.
C'était à peu près la même rengaine dans Drive que j'adore.
Mais alors qu'est-ce qui ne marche pas ?
Qu'est-ce qui cloche ? Je ne sais vraiment pas.
Il y a des oeuvres pour lesquelles je n'ai pas de reproche à faire, faute de pouvoir mettre le doigt dessus.
Et je ne suis pas du genre à enculer les mouches.
Pourquoi serais-je hermétique pour un domaine aussi varié que le cinéma ?
D'autant plus quand c'est le thème des vikings dont je suis très bon client. Pour leurs épopées mythiques, leur façon de mûrir dans la guerre, leur rapport aux sacrifices, aux armes et aux divinités.
Là où je continue d'être en admiration, c'est devant le travail d'esthétisme que livre Refn. Une hypnose visuelle, à la frontière de la brutalité et de la poésie.
Son délire fluorescent à certains moments ne passe pas loin de la limite rouge.
Parfois il en fait trop, mais foncièrement on assiste à un défilement de paysages oniriques et de séquences boueuses, parfaitement dans le ton affiché, sous n'importe quelle forme qui soit... Et les acteurs et leur sale mine s'y imprègnent, Mads Mikklesen en tête d'affiche. Pas de quoi sautiller devant leur jeu, ils font le boulot escompté.
Je vois partout les termes "interprétation", "expérimental", etc.
J'en sais trop rien. Je m'en fous un peu de savoir si ces mots sont justes, ou faussés.
L'interprétation, il y en a systématiquement, à mesure qu'un récit s'enfonce dans les limbes étriqués tels qu'on les voit dans ce voyage du Guerrier Silencieux. L'interprétation de quoi d'ailleurs ?
L'expérimental, un film peut-il s'en targuer comme une qualité à part, ou s'en contenter parce qu'il ne met pas tout le monde d'accord et qu'il faut lui trouver une raison d'exister ? Refn, avec son long-métrage, rend ça possible par rapport à sa propre carrière. Il n'a pas cherché à changer le monde du cinéma, mais à changer son petit îlot de cinéma.
Dès lors qu'un film bouscule les habitudes et les codes, qu'il s'avère peu compréhensible, comment peut-on le qualifier d'expérimental, quand la notion d'expérimentation est elle-même indéfinie ?
Je ne suis pas foudingue de Valhalla Rising. Je ne sais pas quoi en penser.
Je suis un spectateur dans la brume, comme ces guerriers dans leur drakkar.
Or c'est une expérience, déroutante de prime d'abord, mais légitime. Elle nous malmène, ne nous amène pas là où l'attend, tout en ayant ce zèle énigmatique.
J'ai l'impression d'en parler comme si ça m'avait plu (qu'à moitié), mais il convient de faire l'état des lieux, le plus franchement possible, et sans exhorte.
A ne pas mettre entre toutes les mains...