Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées par MaximeMichaut
Dès l'ouverture se dessine l'ombre majeure de la trilogie du Hobbit : le souffle éreinté du découpage de chaque épisode, vouté sous le poids de la générosité dévorante de Peter Jackson. La première moitié de La Bataille des Cinq Armées pâtit alors d'étranges enchaînements, calme sinueux avant la tempête de la guerre, entamée par une scène d'ouverture enflammée dont le sort de sa figure dominante nous amène à penser qu'elle n'a rien à faire là : son arc narratif et émotionnel appartient à La Désolation de Smaug.
Passée cette seule ombre au tableau, fugace, la générosité du réalisateur transmet surtout la jouissance enragée d'un grand spectacle épique et décompléxé. Les moments de bravoure se multiplient, les tragédies bouleversantes côtoyant des coups de folie grand-guignolesques, chorégraphie héroïque au rythme effréné qui ne laisse jamais dans sa poche la dramaturgie et la rêverie plastique. Même si le conte qu'il est nous réserve quelques notes d'humour bienvenue, c'est surtout sa condition de voyage tragique qui nous happe : la brume de la guerre, menée par de stupides cupidités, menacent l'aura des protagonistes que l'on connaît depuis deux films, menant une heure battant dans l'immensité du champ de bataille un ballet de parjures et de sacrifices. Épopée déchaînée et furibarde n'attendant que les annexes de son montage complet pour briller, La Bataille des Cinq Armées est une explosion d'émotions, une galerie d'inventions homériques, délice candide et poétique poussant la foi de son cinéaste devant la machine à billets qu'il déclenche. L'épilogue, réinvocation évidente, ouvre l'ultime stigmate d'une mémorable odyssée de treize ans, nous rappelant oh combien il est difficile de laisser la Terre du Milieu derrière soi.