Préambule : j'ai vu le film en 24 fps donc pas d'avis sur la 3D HFR.

Neuf ans. Il aura fallu neuf années entières pour que Peter Jackson nous transporte une nouvelle fois en Terre du Milieu. L’adaptation du Hobbit, c’était pourtant la première chose à laquelle on a pensé en décembre 2003 alors que Frodon faisait route pour Valinor. La production ne s’est pas faite sans difficultés : les problèmes financiers de la MGM ont créés de nombreux retards, causant le départ de Guillermo del Toro du projet et le retour de Peter Jackson.
Qui plus est, les fans des premiers films et des romans de Tolkien étaient inquiets à juste titre : un petit livre destiné au jeune public adapté en deux puis trois films, des rajouts issus des appendices mais aussi des éléments inventés de toutes pièces, la présence de treize nains tous différents et dont on se méfiait de l’humour, et une tonalité qui ne pouvait être qu’étrange vu le livre et la volonté du réalisateur de faire quelque chose dans la continuité des précédents

Mais Peter Jackson balaye tout ça d’un mouvement de caméra et livre un film digne de figurer en bonne place à coté du Seigneur des Anneaux.

Ce voyage est effectivement inattendu, non seulement pour le jeune Hobbit que l’on vient chercher pour venir en aide à des nains mais aussi pour le spectateur qui se méfiait de l’adaptation. Ainsi, Le Hobbit s’ouvre sur une scène se déroulant juste avant la fête d’anniversaire de Bilbo, vue dans la Communauté. Le Hobbit commence à écrire son histoire pour la raconter à Frodon, qui lui-même saisit son livre pour aller faire une surprise à Gandalf, que tout le monde attend.
Ce préambule, emprunt de nostalgie, sera prolongé par une introduction racontant l’histoire des nains avant de nous emmener au coeur-même de l’histoire. Il permettra surtout au spectateur de retrouver ses marques. Ceux qui n’aiment pas le travail de Peter Jackson n’apprécieront d’ailleurs guère ce nouveau film tant nous sommes en terrain connu.
Mais au delà de l’introduction en elle-même, sa place chronologique dans l’univers et quelques scènes écrites par Tolkien et figurant dans le Seigneur des Anneaux prouvent que Peter Jackson a tout compris sur la manière d’adapter J.R.R Tolkien au cinéma.

N’en déplaisent aux fans intégristes de l’écrivain anglais qui ont mis pendant des années un point d’honneur à s’en prendre au Neo-zélandais, lui reprochant de ne pas adapter Tolkien comme il faut, Le Hobbit est un monument d’adaptation. Peter Jackson, Philipa Boyens, Frances Walsh mais aussi Guillermo del Toro se sont plongés dans l’univers de la Terre du Milieu écrit par le professeur d’Oxford pour adapter le livre au pied de la lettre et plus encore.
Si l’on pouvait reprocher quelques ajouts maladroits dans les premiers films (à quoi sert vraiment Arwen ?), on ne peut ici qu’applaudir devant le boulot d’écriture. Les scénaristes ont intégré à l’histoire différents éléments venus d’ailleurs pour servir leur propos à l’écran. A l’image de Bilbo planquant son argenterie le jour de son anniversaire, le film fourmille d’éléments issus de différentes histoires et servant un seul but : illustrer le propos à l’écran.
Si Jackson et ses scénaristes développent le background du nain Thorin et modifient quelque peu le personnage de l’orc Azog, c’est pour mieux inclure dans le récit une véritable menace et, au passage, mettre en image la Bataille d’Azanulbizar. Sans cet aspect, essentiel au film, le spectateur se serait contenté d’une bande de nains marchants dans la campagne, et si on peut l’apprécier à la lecture des pages de Tolkien, c’est sans intérêt aucun dans une salle de cinéma.

Evidemment Jackson reste Jackson et le spectateur découvrira quelques scènes spectaculaires et inédites comme certaines séquences au Royaume des Gobelins ou un moment incroyable dans des montagnes où la Compagnie doit éviter des chutes. Le réalisateur est d’ailleurs en très grande forme et livre un film dont certains passages sont tout simplement plus beaux que le Seigneur des Anneaux. Un seul exemple : la fameuse scène où Bilbo accueille les 13 nains chez lui et où la réunion tourne au banquet. Eclairé magnifiquement à la bougie, le chapitre est un monument de mise en scène, où la caméra posée à hauteur de Hobbit virevolte d’une pièce à l’autre, d’un nain à l’autre. On pourrait mentionner les différentes scènes d’actions ou les larges plans de Nouvelle Zélande améliorés par la musique d’un Howard Shore à son sommet, dont la nouvelle composition est dérivée de la chanson “Far Over the Misty Mountains Cold” que l’on pouvait entendre dans le nouveau teaser.

L’une des inquiétudes majeures, sans doute la plus justifiée d’ailleurs, était le rythme. Le Hobbit dans version roman de poche ne fait que 320 pages contre près de 2000 pour le Seigneur des Anneaux. Comment faire donc trois films de plus de deux heures en ayant six fois moins de matière et sans que le spectateur s’ennuie ? Tout simplement comme on le disait plus haut : en adaptant fidèlement Tolkien et en le sublimant à l’écran. Jackson prend tout son temps pour raconter son histoire. Les scènes sont donc très longues, mais on ne s’ennuie jamais. Les 2h40 du film passent sans problème, sans qu’on ressente la moindre baisse de rythme. Même une scène pas forcément très dynamique d’un point de vue cinématographique comme celle du face à face Bilbo-Gollum et la découverte de l’anneau parvient à être passionnante tant le réalisateur est un raconteur d’histoires passionnant et passionné.

On est en terrain connu en terme de tonalité aussi. Certes, le film contient une certaine dose d’humour, d’avantage même que ses prédécesseurs à cause de la présence des Nains mais on est bien loin de ce que pouvait laissait craindre la promotion, celle qui affichait Bombur armé d’une grosse cuillère et d’une saucisse. Même si certaines scènes sont ont une tendance à virer au gag de cartoon, le Hobbit est un film étonnamment sérieux, de bout en bout. Evidemment, si vous n’aimez pas les nains et que le coté très britannique des Hobbits vous emmerde, vous passerez à coté du plaisir ressenti. Sinon, vous prendrez du plaisir du début à la fin, de Bilbo face à ses problèmes de vaisselle jusqu’au morceau de bravoure final, celui qui fait mouiller les yeux.

Il n’y a donc pas grand chose à reprocher au Hobbit, si ce n’est peut-être de ne pas avoir réussi à parfaitement gérer treize nains à l’écran (soit quinze personnages principaux !), et d’avoir fait de Radagast Le Brun un clodo un peu ridicule.
Ainsi seuls Kili et Balin (le fameux cousin) tirent leur épingle du jeu, le reste du groupe pouvant être considéré plus en tant qu’entité qu’individus. Le reste n’est que bonheur : Martin Freeman est parfait en Bilbo, Richard Armitage en Thorin est un héros déterminé incroyable et Ian McKellen prend un malin plaisir à retrouver le costume de Gandalf le Gris.

Vous l’avez compris : Le Roi Peter Jackson est de retour et non content d’avoir lu Tolkien pour mieux l’adapter, le réalisateur nous plonge une nouvelle fois avec émerveillement dans l’univers d’une incroyable Compagnie. On n’a qu’une seule hâte : retourner au plus vite, encore, en Terre du Milieu.
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le 7 déc. 2012

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