L'ennemi de mon ennemi est mon ami, ou bien mon ennemi ?



  • On a ramené madame Yeaby dans la semaine.

  • Et pas Angie, et les filles ?

  • Allez savoir pourquoi. Mais à vrai dire, il aurait mieux valu que madame Yeaby ne rentre jamais. Autre chose... Angie et moi allions nous marier prochainement. Elle vous a attendu en vain, et à fini par vous croire mort. Elle l'a cru, elle l'a éspéré, et un jour elle l'a su.

  • Vous mentez.



Le Jour des Apaches réalisé par Jerry Thorpe n'est peut-être pas un des grands classiques du western, mais il reste une oeuvre conséquente qui vient offrir à l'époque une véritable réponse américaine au western italien qui à ce moment-là explosait tout sur son passage. Charles Marquis Warren et Éric Bercovici viennent offrir un scénario efficace et vivant explorant le nihilisme humain par le biais de personnages sagement développés, que le cinéaste va savamment entretenir par des successions de péripéties amenant son lot de surprise et de constructions dramatique autant dans le fond que la forme. Pour marquer le coup, Thorpe s'entoure de deux grosses pointures avec Glenn Ford et Arthur Kennedy qui en grandes stars du western assure à tous les niveaux. Deux gueules du far west qui vont devoir faire équipe pour retrouver la femme et les enfants de ceux-ci, capturé par les Apaches, l'un étant le mari (Glenn Ford) et l'autre l'amant (Arthur Kennedy). Une situation ambiguë et complexe qui va amener son lot de conséquences où les deux hommes ne cesseront de s'opposer à mesure qu'ils traverseront les sables arides du désert ainsi que les difficultés allant avec, qui finalement en feront des alliés.


Ce que j'ai vraiment adoré dans Le Jour des Apaches, c'est à quel point les deux personnages principaux sont bien développés. Glenn Ford est une fois de plus monstrueux, en tant que Lorn Warfield connu comme étant le meilleur tireur de l'ouest. Un rôle dans lequel il fait des merveilles en tant qu'ancienne gachette voulant aujourd'hui tourner le dos à cette vie, alors que des années plus tôt, pour s'adonner à cette violence, Warfield a quitté son foyer avec sa femme "Angie" et ses deux filles, laissant à Angie comme seule autre option que de se trouver un amant pour pouvoir continuer à avancer dans la vie (croyant ou espérant que son mari soit mort afin d'éviter un scandale). Le fermier avec qui Angie a fondé une nouvelle vie de famille en la personne d'Owen Forbes est incarné par un Arthur Kennedy saisissant de réalisme. Kennedy malgré l'age fait encore preuve de charisme. Glenn Ford s'en veut pour avoir délaissé sa femme et ses filles, de ne pas avoir été là pour les protéger; alors que pour Arthur Kennedy le malaise se situe dans le fait qu'il était présent lorsque les Apaches sont venus enlever les filles et qu'il n'a par impuissance rien pu faire pour les protéger. Aucun des deux hommes n'est parfait, chacun ayant ses torts, ses hontes et ses regrets, voulant se racheter en délivrant les femmes de leurs coeurs. Si au départ les deux hommes se vouent une haine l'un pour l'autre, tout le développement scénaristique les entourant va donner naissance à une entente au service d'une cause commune leur permettant de toujours plus avancer pour atteindre l'objectif ultime.


La relation entre les deux protagonistes est extrêmement convaincante, au point qu'elle en devient le moteur principal du film, avec des personnalités intelligemment exposées favorisant des situations dramatiques de haute volée au point de susciter de vives émotions avec une intensité atmosphérique poignant au cours d'une scène finale aux graves conséquences. "L'ennemie de mon ennemie est mon ami". Une citation pleine de sens, seulement que se passe-t-il si tu vaincs l'ennemi commun ? Ton ennemi initial sera-t-il toujours ton ennemi ? Des réponses auxquelles le cinéaste répond avec beaucoup de sang-froid. Le plus intelligent vient de l'élévation du récit qui pas une fois ne prend parti pour Glenn Ford ou Arthur Kennedy, ne faisant d'aucun d'eux quelqu'un de moins bon ou mauvais que l'autre, afin de mieux laisser le soin au spectateur de décider lequel mérite réellement d'obtenir la garde des filles. Un choix qui pour les deux hommes va forcément aboutir sur un affrontement ultime. Une opposition alarmante qui ébranle, venant briser le coeur du spectateur au cours d'un final terriblement tragique et injuste, où après avoir traversé l'enfer par une union inattendue, Glenn Ford et Arthur Kennedy doivent s'affronter dans un duel à mort car aucun d'eux ne veut délaisser celles qu'ils aiment. Une construction dramatique habile, affective et emotive qui se termine par une déconstruction dramatique sadique, amer et impitoyable à la résultante forcément terrible.


Jerry Thorpe fait techniquement du bon boulot en livrant une réalisation propre qui livre des plans travaillés à travers des décors autant variés que mémorables. En tant que film d'action Le Jour des Apaches est très divertissant. Il se passe toujours quelque chose. Le rythme est tout du long soutenu par des péripéties très appréciable amenant des situations toujours plus saisissantes. Un parfait mélange entre l'action pure et le drame appuyé par une composition musicale signée Alexander Jeff, qui livre une partition plutôt subtile mais malheureusement trop discrète. L'ensemble des personnages que rencontrent Glenn Ford et Arthur Kennedy au cours de leur périple sont très appréciables et notables. Des personnages généreux dans leur traitement, tous interprétés par d'excellents comédiens avec John Anderson, Dean Jagger, Nico Minardos, Dean Stanton, ou encore Royal Dano. Certaines séquences sont iconiques comme :
- lorsque Glenn Ford joue à la roulette Russe (un grand moment);
- l'excellente scène des vautours dans laquelle Ford et Kennedy se retrouvent poings et pieds liés (une situation des plus cocasses);
- la fameuse confrontation contre les Apaches et les tuniques bleues déserteurs (un gros bordel qui part dans tous les sens);
- l'infiltration sur le territoire Apache (un sacré moment de tension);
- et enfin le terrible final entre Glenn Ford et Arthur Kennedy (conclusion tragique).


CONCLUSION :


Le Jour des Apaches de Jerry Thorpe est un excellent western intelligemment alimenté en drame et en action par le biais de multiples péripéties des plus captivantes que les deux comédiens principaux sublimes de par leur interprétation. Un récit qui brille grace à l'intelligente élaboration dramatique autour de Glenn Ford et Arthur Kennedy, le tout à travers des décors riches et variés. On ne s'ennuie pas une seconde. Par contre, qu'est-ce que c'est que ce titre français qui en comparaison du titre original : "Day of the evil gun (titre qui fait sens au film)" ne paye pas beaucoup de mine.


Glenn Ford et Arthur Kennedy, des acteurs vieillissant pourtant encore au top du top!

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le 26 juil. 2021

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