Sous les pavés, la plage et sous la plage, les balles, les corps et le sang qui coule sur le sable comme le fait l’eau de mer. Ce film, Le Jour Le Plus Long, efface son statut d’œuvre cinématographique derrière les enjeux de l’Histoire, ses réalisateurs, artisans d’un chantier titanesque à l’époque, ses acteurs, tous plus prestigieux les uns que les autres, s’inclinent devant ce qui reste peut-être comme la bataille la plus importante de l’humanité.
Personne ne retient qui sont les réalisateurs de ce mémorial, chacun ayant été chargé de présenter à l’écran les combattants d’une nation. Tous, nous avons vu et revu Le Jour Le Plus Long, nous avons retenu quelques visages, parfois furtifs comme ceux de Bourvil et Sean Connery, parfois plus présents comme ceux de Richard Burton ou Robert Mitchum. Mais il reste cette impression entêtante, comme un parfum, que de pouvoir être confortablement assis à voir ce long-métrage, nous le devons en partie à ces hommes qui vont, sous nos yeux, vers une mort probable. Des hommes parfois si jeunes, convaincus que leur mort pouvait avoir rendez-vous avec la survie de l’humanité et qui s’engagèrent parfois en mentant sur leur âge.
Là ou Steven Spielberg a commis l’erreur de débuter par le débarquement, son film se terminant du coup au bout d’une demi-heure, Le Jour Le Plus Long commence avec le rythme d’un film-catastrophe, naviguant d’un camp à l’autre, errant entre les protagonistes, faisant efficacement monter un suspens dont on connait pourtant l’issue. C’est finalement dans la deuxième moitié que débute le lâcher des troupes sur les plages normandes et, si ce film n’a pas le côté exhibitionniste indécent du Soldat Ryan (qui ne s’est vendu que là-dessus finalement), il y gagne en intensité dramatique. On voit littéralement les événements prendre vie, quand bien même le côté cowboy est bien présent. On sourit au premier coup de canon, on jubile devant la déconfiture du Generalfeldmarschall Von Rundstedt, lorsqu’il voit apparaître les cinq milles navires sur la ligne d’horizon bref, lorsque le régime nazi entame alors sa chute inexorable.
Ce film est à voir à l’infinie, il reste le seul témoignage crédible d’un des plus importants événements de notre temps. Peu le savent, mais il n’existe que huit photographies comme seul témoignage pictural de ce débarquement. Tous les films d’archive sur le sujet ne sont que des reprises des autres débarquement, c’est dire l’importance de ce film qui prend alors une valeur quasi-documentaire, le film de Spielberg étant beaucoup plus hollywoodien et tire-larmes. Quand le temps viendra, je ferai comme l’a fait mon père, je transmettrai ce film à mes enfants, plus par devoir pédagogique que par devoir de mémoire, mais par souci d’essentiel…