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Trois réalisateurs, des dizaines de stars de toutes nationalités et trois heures de bobines, il n’en faudra pas moins pour dépeindre le D Day, début de la bataille de Normandie et moment de bravoure sacrificielle souvent mise sur le devant de l’Histoire occidentale.
The Longest Day fait le choix de démarrer dans les heures qui précèdent le lancement de l’invasion, alors que les soldats sont campés sur les côtes britanniques, profitant comme ils le peuvent de leurs derniers instants avant l’ordre fatidique. Pour rompre la tension et pallier l’appréhension, on s’adonne à des paris dont les gains seront sans doute pour l’outre tombe, on fait les cent pas, on discute passé et avenir sans trop y croire. De l’autre côté de la Manche, les allemands se reposent sur leurs lauriers, convaincus d’être au fait du plan des Alliés.
Puis vient l’ordre, et la diffusion radio aux Français libres. Les éclaireurs sont parachutés, et les escarmouches débutent pour préparer le terrain, lorsque celles-ci ne tournent pas en massacre dû aux aléas météorologiques. L’attente est terminée, et le spectateur n’aura plus de répit jusqu’à la fin du métrage, alors que les embarcations arrivent aux plages Omaha, Sword, Juno, Gold et Utah, et que l’on s’engouffre dans un long couloir assourdissant de fracas qui ne s’achèvera que par la victoire de ce 6 juin 1944.
Cette fresque en crescendo est servie par un casting ahurissant dont je ne ferais pas la liste bien trop exhaustive, mais qui permet tout de même à une situation improbable où Bourvil cotoie Sean Connery. La musique de Maurice Jarre vient souligner l’ensemble avec virtuosité, et contribue à ce souffle épique qui traverse le film. Seulement il y a un hic, c’est que tout cela se fait sans nuance aucune. Des éléments comiques parsèment le film (les criquets, les patrouilles qui se croisent, les bottes à l’envers), tandis que les nazis sont vraiment trop bêtes pour être crédibles et les alliés bien trop courageux et intrépides. On comprend le manichéisme (s’il y a bien une guerre où cela est permis, c’est celle-ci), mais on regrette le manque de nuance. De même qu’on regrette ces saynètes forcées pour donner du temps d’écran aux stars (Henry Fonda en fils de Roosevelt par exemple), et ce patriotisme exacerbé qui en oublierait presque de dépeindre la boucherie que fut l’opération Overlord. On ose pas le choc, comme le fera Spielberg près de quatre décennies plus tard, et on vante l’armée. Alors certes, le français de 2024 que je suis lui est redevable, mais n’en faisons pas une éloge aussi peu nuancée. Mais l’époque de production veut…
Malgré ce bémol, il est difficile de rester de marbre devant un tel morceau de bravoure. L'impressionnant est dans tous les recoins de l'œuvre, et les multiples variations point de vue permettent d’avoir une bonne cartographie mentale des événements. Enfin, le jour le plus long se termine sur un beau dialogue qui vient tempérer mes reproches du paragraphes précédent:
He's dead. I'm crippled. You're lost. Do you suppose it's always like that? I mean war.
Une belle question rhétorique.