Témoin de la défense (Au nom d’une paire)
Parmi la profusion de liste ineptes et sans objet que je me suis amusé à pondre depuis mon arrivée sur ce site, il y en a évidemment une ou deux qui comptent plus que d’autres, dont la signification correspond à quelque chose de plus profond en moi, dont les thèmes résonnent suffisamment fort pour que ma perception des films qui y entrent en soient affectés. L’une d’entre elle est "mon père ce bourreau".
Ce que j’ai vécu avec mon père fut si compliqué, fait de tant d’incompréhensions absolues, de tensions, de défis ou d’oublis réciproques que lorsque ce dernier quitta ce bas-monde, je me montrai incapable d’éprouver la moindre émotion, m’obligeant à me demander qui de nous deux était le véritable monstre. Un truc assez fort, vous en conviendrez.
-Dans ces conditions, un film traitant du conflit violent et ancien entre un père et un fils peut-il infléchir votre appréciation sur la qualité de l’ensemble ?
-C’est fort possible.
-Je n’ai pas d’autres questions, votre honneur.
Témoin de l’accusation (L’avocat du fiable)
Quand un film annonce la couleur dès ses premières secondes (en gros, on en devine très clairement la fin au bout de 10 minutes), il faut que la façon dont il progresse soit sacrément réussie. Ce qui est quand même presque le cas ici.
Cet avocat brillant et cynique qui revient dans son village natal pour y enterrer sa mère et doit venir au secours de son père, juge local inflexible depuis 42 ans, amateur de lourdes peines (un père peinard, en quelques sortes), avec qui il avait rompu tous les ponts depuis ses études, ne laisse pas de place à l’imprévu: nous sommes en terrain extrêmement balisé et prévisible.
La qualité d’écriture de certaines scènes, la qualité d’interprétation des deux Robert (Downey Jr., Duvall) tiennent le film à bout de bras. Les deux frères (Vincent d’Onofrio, touchant), dont un handicapé (le simple d’esprit du titre), et la fille, au rire si communicatif, sont à la hauteur des deux superbes cabots.
Autre point positif, le récit laisse en suspens suffisamment de choses pour ne pas l’enfermer dans un carcan asphyxiant. La salle d’audience reste aérée.
-Les qualités que vous soulevez suffisent-elles à expliquer la clémence dont vous semblez coupable, à propos de ce film ?
-C’est probable.
-Je n’ai pas d’autres questions, votre honneur.
Les auditions sont donc terminées. Je vous laisse, juge.