- Il fait pas bon se balader dans le Labyrinthe.
- On est piégés comme des rats dans cet endroit, c'est ça ?
- Pour le moment. Mais... tu vois ces gars ? Près du feu ? Ce sont les coureurs. Celui du milieu, c'est Minho. Le chef des coureurs. Tous les matins, ils foncent dans le Labyrinthe. Ils le répertorient, le mémorisent pour trouver une sortie.
- Ils cherchent depuis quand ?
- Trois ans.
- Et ils n'ont rien trouvé ?
- Plus facile à dire qu'à faire. Écoute. Tu entends ? C'est le Labyrinthe. Il se transforme. Toutes les nuits.
- Comment c'est possible ?
- Demande aux bâtards qui nous ont enfermés...
Le seul moyen de se tirer, c'est le Labyrinthe
Le Labyrinthe réalisé par Wes Ball est une science-fiction post-apocalyptique basée sur le roman éponyme de James Dashner. Un teen movie qui s'inscrit dans une mode d'adaptation cinématographique pour adolescents initiés par Twilight et suivi par de nombreux autres titres, auquel Labyrinthe va apporter une mécanique paranoïaque bienvenu venant contraster avec la formule de base. D'emblée de jeu le récit nous plonge avec brutalité dans l'action avec Thomas (Dylan O'Brien), qui se réveille amnésique dans un monte-charge de fret qui débouche sans faire de façons dans une vaste plaine où l'attend un groupe d'adolescents qui ont également perdu la mémoire. Une ouverture percutante qui a le mérite de nous glisser efficacement sous la peau du jeune homme auquel on s'identifie sans mal. On découvre en même temps que lui l'étrange environnement dans lequel il a débarqué. Une scène intrigante qui pique instantanément votre intérêt à la vue du terrible décor dans lequel Thomas vient de mettre un pied : le "Bloc". Un endroit étrange entouré de vastes murs servant de lieu de vie aux "Blocards". Une communauté entièrement masculine vivant dans une gigantesque prison sans geôliers à travers des règles de vie précises permettant au groupe de survivre à cette longue agonie de plusieurs années.
« On a trois règles. La première : fais ton boulot. Y a pas de grandeurs, ici. La seconde : ne frappe jamais un Blocard. Notre communauté est basée sur la confiance. Et la plus importante : tu ne vas jamais de l'autre côté. »
Une agonie symbolisée par quatre grands murs qui entourent et enferment toute la clairière. Chaque mur a une ouverture en son centre, appelée les "Portes", qui se ferment chaque nuit et s'ouvrent chaque matin. Au passage des Portes se trouve le "Labyrinthe".
L'intérêt premier de l'intrigue réside dans la présence omnisciente et inquiétante du labyrinthe qui offre un cadre huis clos conséquent à l'origine d'une tension atmosphérique efficace. Le Labyrinthe s'étale sur plusieurs kilomètres avec de nombreux chemins sinueux articulés autour de 8 sections dont les murs se déplacent à mesure que le temps passe pour se reconstituer à peu près à l'identique tous les mois. Les sections sont reliées entre elles par des ouvertures dont l'emplacement ne change jamais contrairement aux chemins qui les y mènent. L'ouverture des Portes de même que les sections s'alternent chaque jour dans une même schématisation de séquence des sections : 7-1-5-2-6-4-8-3. Un labyrinthe si bien cartographié par ses occupants qu'on se dit que finalement malgré son imposante conception et sa capacité à se mouvoir continuellement on peut en sortir sans trop de difficulté. Sauf, qu'aucune porte de sortie n'est visible et pour couronner le tout, au sein de cette enceinte massive se cachent des terribles créatures qui sortent à la tombée de la nuit lors de la fermeture des Portes. Des choses hideuses appelées les "Griffeurs". Des monstres d'une bestialité rare ayant la capacité de véhiculer un terrible virus à partir d'une piqûre transformant en une sorte de zombie celui qui se retrouve infesté. Où est-ce que Thomas a atterri ? Qu'est-ce-que c'est que ce groupe qui ne se souvient de rien et qui est rejoint chaque mois par un nouveau membre accompagné de vivres ? Que sont ces monstres répugnants ? Et surtout, qu'est-ce que ce labyrinthe gigantesque ? Tant de questions dont on restera sans réponses jusqu'au levé du rideau final. Une conception qui à le mérite de poser une ambiance hautement mystérieuse favorisant l'intérêt du spectateur qui n'a envie que d'une chose : poursuivre l'aventure.
Une mythologie autant intrigante qu'intéressante construite autour d'une histoire qui va droit à l'essentiel sous un rythme soutenu qui s'encombre de peu de choses (même de la logique !) pour gratifier le récit d'une dynamique constante. On pourrait aller jusqu'à parler d'un survival horror version adolescent avec les monstres qui apportent l'élément d'horreur à une atmosphère initialement inquiétante avec son décor propice. Une horreur devenant l'attraction première du film, à bien entendu grandement nuancer par sa construction narrative qui surfe sur une mouvance adolescente. Une construction qui pose les limites d'une formule qui pour convenir au public visé va devoir s'enticher d'une censure obligatoire et de certains clichés que le cinéaste a tout de même le mérite d'essayer de contourner au maximum. Une prémisse engageante qui rapidement donne le ton à une action constante qui avec son ambiance claustrophobique apporte de nombreuses torsions et autres virevoltent à l'image des innombrables virages des couloirs du labyrinthe. Une action rafraîchissante et divertissante articulée autour d'une lutte intense pour la survie. Un bon équilibre entre des scènes de fuites et de cache-cache haletantes, des confrontations radicales contre un ennemi affamé, et des stratégies survivalistes où l'union fait la force. Mais pour cela, il faut passer outre les rivalités masculines qui font rage depuis l'arrivée de Thomas qui bouscule l'ordre établi. En plus du mystère à tendance horrifique et de l'action continue s'ajoutent des éléments dramatiques qui ne manquent pas d'arguments pour en faire une expérience appréciable.
- C’est calme hein ? J’sais qu’c’est dur à croire mais ça n’a pas toujours été le cas. On a connu des jours sombres. On a perdu pas mal de camarades qui pétaient les plombs. Terrorisés. Mais on a fait du chemin depuis. On a établi nos règles. Trouvé la paix.
- D’accord… mais pourquoi tu me dis tout ça ?
- Parce que t’es différent des autres, tu es curieux. Mais aujourd’hui tu es des nôtres. Tu dois comprendre ce que ça veut dire.
La réalisation sans être formidable fait un travail satisfaisant qui manque certainement de personnalité ce qui lui vaut de se confondre dans les mouvances techniques typiques des blockbusters de commande spécial teen movie. Une confection certainement regrettable au vu de son théâtre de jeu pourtant propice à une mise en scène imaginative. Quelques petites tentatives "ingénieuses" restent à retenir durant la première apparition du Griffeur, mais rien de bien folichon. On appréciera au moins la justesse de la caméra tremblante utilisée durant les scènes d'action qui parvient à être suffisamment juste pour rendre une perspective de champ crédible et lisible. La photographie est correcte avec une colorimétrie qui cadre bien avec le contraste sombre et austère des couloirs du labyrinthe. Pour les effets spéciaux, le budget limité se fait ressentir au niveau de quelques scènes. La composition musicale de John Paesano sans être mauvaise est délébile. Des musiques qui accompagnent correctement l'ensemble du périple mais qui n'impacte jamais l'image de sa tonalité. Une orchestration à l'image de l'entièreté technique de ce film : « sympa, mais oubliable ! » Si on ressort du spectacle plutôt "réjoui", on regrette qu'aucune scène ne parvient à être mémorable et ce malgré les nombreuses péripéties divertissantes. On dira que le film est cool sans réellement pouvoir décrire une séquence en particulier.
Côté casting et personnages le résultat est tout autant approximatif. La dramatique fonctionne assez bien entre les membres de cette communauté sur lequel est construit une narration juste qui ne tombe pas dans la facilité mélodramatique. Une maturité logique avec ce groupe qui pour survivre s'est créé un cadre de règles structuré où chacun joue un rôle précis. La venue de Thomas vient faire trembler cette stabilité ce qui va entraîner des tensions bienvenues, malheureusement desservies par le jeu inégal des acteurs. Des comédiens qui pour certains ont du mal à être crédible, malgré j'en suis sûr l'envie de bien faire, comme avec Maze Minho par Ki Hong Lee, Alby par Aml Ameen, le petit Chuck par Blake Cooper... Thomas Brodie-Sangster en tant que Newt s'en sort mieux, de même que Will Poulter pour Gally qui offre une dualité intéressante à Thomas, seulement les deux comédiens manquent de charismes. Chez les garçons, Thomas incarné par Dylan O'Brien est le seul à offrir une performance et une carrure suffisante. En tant que tel, il est le catalyseur des rebondissements scénaristiques. Les flashbacks dont il est tout du long affublé par des brides de souvenirs de l'extérieur du labyrinthe amènent un dynamisme supplémentaire avec l'introduction d’une mystérieuse organisation appelée W.C.K.D. Des fragments du passé allié à une attitude téméraire et dégomme tout qui sera le moteur de conduite essentiel de Thomas qui va tout faire pour trouver un moyen de s'échapper. Côté dame, si Patricia Clarkson en tant que Paige Ava est anecdotique, voire insignifiante, Kaya Scodelario pour Teresa s'en sort mieux. Une présence féminine qui fait du bien à l'image bien qu'on ait du mal à comprendre l'utilité de Teresa. Une participation qui n'apporte rien à l'intrigue. Même si son incarnation est bonne, on a l'impression que la comédienne ne fait qu'acte de présence. C'est dommage, surtout qu'on aurait imaginé qu'une jeune et belle femme qui débarque dans une prison pleine d'adolescents masculins allait créer des tensions d'ordre primaire, mais même pas. « À croire que les adolescents ne pensent jamais au sexe. »
Si le mystère et l'action servent avec efficacité le récit, la logique beaucoup moins. Que le film ne réponde pas à l'ensemble des questions ne me pose aucun problème. Après tout, il est le premier volet d'une trilogie et il faut garder des révélations en réserve pour la suite. La problématique vient des explications elles-mêmes, qui apportent des clarifications foireuses. Des indications peu concluantes où on se demande si on ne nous prend pas pour des idiots.
SPOILER SPOILER SPOILER SPOILER
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On nous explique que le monde extérieur est détruit par les radiations du soleil et qu'il est à l'origine d'un virus mortel ayant anéanti la quasi-population mondiale. Après des années d'impossibilité à trouver un antivirus, voilà qu'arrive une nouvelle génération d'humains (des adolescents) ayant dans leurs codes génétiques la solution pour créer un vaccin. Seulement pour activer ce gène il faut confronter son porteur à des conditions extrêmes. Donc, pour résumer, il y a un gars, pour le coup une femme, qui s'est dite : « Mais bien sûr ! Eurêka ! Pour créer un contexte de détresse suffisamment extrême on va créer un labyrinthe géant capable de se mouvoir, auquel on va ajouter des monstres mutants spécialement conçu pour l'occasion. » Conclusion : une personne (probablement un peu trop fan de romans fantastiques), n'a rien trouvé de mieux comme idée que de se lancer sur un projet improbable coûtant des milliards et qui a dû prendre des années pour être construit, afin de créer un climat suffisamment austère pour réveiller des anticorps. De qui on se moque, il n'y avait pas plus simple ? Un flingue sur la tempe, enfermé vivant dans un cercueil, tortures, où simplement le monde lui-même qui est justement devenu un véritable enfer ! Les solutions ne manquent pas et on choisit celle-là. Logique ! Un labyrinthe géant avec un écosystème de dingue pour tester l'esprit des êtres humains sous pression alors que finalement le monde extérieur est pire : bein oui, bien sûr !
FIN SPOILER FIN SPOILER FIN SPOILER
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Ajoutons des trous d'explications qui amoindrissent la stabilité et la structuration du récit. Thomas fait une réflexion logique : « Vous avez déjà essayé d'escalader le mur ? » À quoi on lui répond : « Ouais. Mais le lierre ne monte pas jusqu'en haut. » Tout d'abord, en plus d'être amnésique, il semblerait que les Blocards sont aveugles car sur la plupart des images de fonds on voit en arrière plan le lierre qui monte jusqu'en haut. Mais passons, le plus hilarant et grotesque c'est que le film s'évertue tout du long à nous montrer des ados qui pour survivre se sont adaptés et ont créer des maisons et des outils à partir de bois, de cordes... Du coup, fabriquer des cabanes dans les arbres et des maquettes géantes du labyrinthe ça oui, aucun problème, mais construire une simple échelle, ça non, c'est impossible. Surtout qu'ils accèdent à la tourelle par des échelles. Logique ! Je veux bien fermer les yeux sur de nombreux points négatifs ou illogiques mais à un tel point c'est difficile de passer outre. Trop de logique ennuie. L'illogisme irrite.
CONCLUSION :
Le Labyrinthe de Wes Ball basé sur le roman éponyme de James Dashner, est une science-fiction post-apocalyptique agréable bien rythmée qui offre un spectacle généreux en action sous un cadre inquiétant édifiant. Un divertissement honnête servi d'une réalisation modérée ainsi que d'une distribution branlante, le tout desservi par une révélation finale pourtant attendue qui malheureusement s'écroule tant l'illogisme domine.
Sur les cendres des plus éprouvantes des déceptions naissent les plus beaux espoirs : « Une aspiration optimiste pour un second opus à venir qui a les cartes en mains pour réussir en appuyant ses points forts et en corrigeant ses maladresses. »
- Il est vraiment con celui-là.
- Le con t’as sauvé la vie aujourd’hui. Crois moi, c’est dangereux dans le labyrinthe.