Je ne connaissais rien du film avant de le regarder et le moins que je puisse dire, c'est que je ne m'attendais pas à quelque chose d'aussi trash et dérangeant.
Tout au long du métrage, nous assistons impuissants à la triste vie de Jérémie, un petit bonhomme de 7 ans que les services sociaux ont remis à sa mère, prostituée, toxicomane et en proie à l'autodestruction.
Arraché au confort rassurant de sa famille d'accueil, le petit va rapidement être initié à l'alcool, à la drogue, à la pornographie et à l'errance par celle qui est sensé le protéger, subissant également la violence et les abus sexuels des différents amants de cette mère indigne.
Un véritable chemin de croix pour cet enfant au parcours particulièrement rude et au destin bien sombre. La mise en scène nous fait ressentir les émotions de Jérémie, via des cadrages serrés et oppressants, et un montage au rythme volontairement effréné lors des scènes où il est drogué ou en souffrance.
Une ambiance sonore plutôt agressive (et parfois agaçante) et quelques effets visuels un peu fantaisistes viennent ponctuellement accentuer la douleur ressentie par le personnage (comme ces espèces d'oiseaux rouges sang qui apparaissent dans l'imaginaire de Jérémie quand il subit des abus physiques), ce qui tranche avec l’esthétique brute et réaliste du film et renforce son atmosphère malsaine et anxiogène.
Le Livre de Jérémie est perturbant de par son propos mais aussi par la manière dont il illustre son sujet et dont il suggère ce qui ne peut être montré. Certaines scènes, tout bonnement glaçantes, sont ainsi judicieusement pensées pour que le message soit explicite sans que l'enfant ne soit directement mis en scène
Comme celle (entre autre) où le petit garçon, travesti et maquillé comme sa mère, vient aguicher le nouvel amant de celle-ci
Déroutant à différent points de vue donc, entre la thématique grave et assez peu banale des violences subies par les enfants, la réalisation punk, brut de décoffrage et une galerie de personnages tous plus abjects les uns que les autres.
Et ce sont des acteurs de renom qui se glissent dans ces rôles particulièrement ingrats, d'Asia Argento, elle-même (que j'ai pris pour Uma Thurman dans un premier temps!), en mère destructrice, à Peter Fonda, Ornella Muti et Ben Foster en fanatiques religieux, en passant par Marylin Manson et Jeremy Renner en beaux-pères pédophiles ou Winona Ryder en psychologue antipathique.
D'ailleurs, mention spéciale pour les petits acteurs qui endossent le rôle de Jérémie à 7 et 11 ans avec beaucoup de justesse et une maturité remarquable.
En fait, quand j'ai compris vers quoi le film allait m'amener, j'ai été tentée de m'arrêter dès le premier quart d'heure. Toute cette violence, toute cette souffrance, toute cette injustice qui s'abat sur les frêles épaules de ce brave garçonnet, c'est quand même vachement dur!
Moi qui suis la première à ricaner quand un gamin se fait laminer dans un film, je dois dire que dans ce genre de contexte, où le sujet de la maltraitance est abordé frontalement et de manière si crue, je n'en mène pas large!
Finalement je ne regrette pas d'être allé jusqu'au bout car malgré le profond malaise que génère le film par son excessive noirceur, Asia Argento ose aborder un sujet sensible et complexe, de manière abrupte et avec férocité certes, mais elle va au bout de son idée, sans ménager le spectateur et avec une certaine originalité.
C'est bien foutu et honnête mais coriace tout de même.