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Le Mal N’existe Pas est avant tout le nouveau long-métrage de Ryūsuke Hamaguchi, réalisateur et scénariste japonais qui commence à prendre une place considérable dans le paysage cinématographique. Il avait notamment réalisé et scénarisé en 2022 Contes du hasard et autres fantaisies, qui avait remporté le Grand Prix du Jury à la Berlinale, mais surtout Drive My Car en 2021, qui avait remporté le prix du scénario au Festival de Cannes.

Ce nouveau long-métrage a par ailleurs été présenté à la Mostra de Venise 2023, où il y avait remporté le Grand Prix du Jury. Ajouté à cela une affiche absolument splendide, il y avait de quoi être impatient.

Sauf que pour ma part, malgré un retour critique unanime, Drive My Car s’avérait déjà être un objet de réflexion complètement froid, qui me plaçait à des kilomètres de ses personnages. En résultaient 3 heures d’ennui abyssal, et le souvenir d’une séance particulièrement douloureuse. Malgré un travail de réalisation que je reconnais brillant, le récit n’arrivait jamais à m’attraper, de par une surabondance d’artifices et de surlignages scénaristiques, rendant le tout sérieusement pompeux.

Et malheureusement, cette nouvelle proposition de Hamaguchi ne fait que confirmer tous mes griefs envers la fausse complexité de son cinéma.

Il faut dire que la première moitié du film est très prometteuse. Le réalisateur japonais nous plonge dans cette nature vivante, à travers une photographie splendide et un jeu sur les éclairages en forêt proprement dément, créant bon nombre de plans sidérants. On finit petit à petit par lâcher prise, afin de se blottir aux côtés de ces personnages et observer leur quotidien aussi simple qu’apaisant. Un postulat qui m’a rappelé Perfect Days, même si j’avoue avoir été plus touché par les randonnées pédestres que par le récurage des toilettes japonais.

Malgré une certaine forme d'ennui inhérente au dispositif de filmage, l'œuvre parvient à nous plonger dans un état de pur bien-être physique, par ailleurs renforcé par un très joli travail de sound design. C'est splendide, hypnotisant et dépaysant. Une vraie belle invitation au calme, au sein des contrées japonaises.

À côté de ça, le film ouvre un propos écologiste intéressant, lors d’une séquence de discussion entre les locaux et des investisseurs tout droits venus de Tokyo. Bon, la rupture avec les scènes filmées en extérieur est assez violente, car c'est plutôt moche et (très) mal éclairé. Impossible cependant de nier la justesse de l’écriture, avec notamment un humour assez efficace.

Certes, on reste sur le béaba du tract écolo, mais on imagine aisément toute la richesse du scénario et du propos corrosif qui peut en découler. Tant de sujets passionnants à explorer : déforestation, pollution de l’eau, réappropriation de territoires ruraux, dérèglement de la vie sauvage...

... mais en fait rien. Finalement, est-ce qu’on s’en fout pas un peu de l’écologie ? Parlons plutôt d’applis de rencontre ou de carrières d’acteurs ratés, non ? Des sujets passionnants, portés par des séquences en voiture à la mise en scène dantesque (non). Le conflit entre les locaux et les citadins s’éternise dans une pure caricature, remplie de bons sentiments et de caractérisations montées à la truelle. Et faire des travellings à répétition avec une jolie musique de fond ne rendra pas le récit plus intelligent.

Un film contemplatif, ça joue toujours sur une ligne très fine, avec un grand nombre d’ingrédients nécessitant un parfait dosage. Malheureusement ici, le symbolisme à outrance fait basculer le long-métrage dans un pur film de petit malin, une réflexion intello totalement vaine, et presque aussi prétentieuse que son titre.

Toute l’œuvre devient littéralement un mélange complètement difforme et très hétérogène, bourré de concepts et d’idées qui n’ont plus aucun liant (en témoignent ces cuts musicaux complètement hasardeux ?!). Le tout s’apparente finalement à une ébauche, un projet clairement inachevé, qui perd son spectateur dans un labyrinthe sans queue ni tête. Je ne sais pas ce que le film veut me raconter, ni même ce qu’il est. Et en réalité, je pense qu’il ne le sait pas lui-même.

Comment ne pas mentionner alors les 15 dernières minutes du métrage, avec un arc scénaristique qui sort complètement du chapeau, et un épilogue pseudo-fantasmé aussi débile que gratos. On pourra certes y apposer toutes les interprétations du monde, notamment une volonté de basculer dans le conte fantastique, mais c’est beaucoup trop mal amené pour être acceptable.

La définition-même de l’auto-sabotage. Après une première partie splendide, vectrice d’un propos très prometteur, le film s’embourbe finalement dans des séquences ronflantes, qui prétendent transmettre des milliers de messages, mais qui au final ne racontent rien. Quelle déception, encore une fois.

M. Hamaguchi, il serait temps de comprendre qu’être un bon réalisateur ne veut pas nécessairement dire être un bon scénariste.


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le 19 août 2024

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