Aube d’orée
Revigorante rupture que celle opérée par Ryusuke Hamaguchi : après des films volontiers verbeux et littéraires, explorant les complexes oscillations des rapports humains et amoureux, Le Mal n’existe...
le 14 avr. 2024
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C'est la première fois (du moins à ma connaissance, en ne se basant que sur le fait que j'ai vu tous ses films que depuis Senses !) que le réalisateur Ryūsuke Hamaguchi ne situe pas principalement son intrigue dans un cadre urbain.
Néanmoins, il ne faut pas plus de quelques secondes pour comprendre qu'il n'a pas oublié d'apporter avec lui son style personnel. En effet, l'ensemble peut être séparé en quelques grandes parties, prenant bien le temps de développer un environnement, des personnages. C'est du Hamaguchi à 100 %.
Ainsi, par exemple, la première demi-heure est une suite de séquences présentant la campagne profonde, notamment à travers les gestes quotidiens habituels d'un homme à tout faire, père d'une petite fille, tout en le faisant croiser ses quelques connaissances. Un monde loin de toute la frénésie que l'on trouve dans les grandes villes. Un monde dans lequel on prend son temps. On savoure un environnement pur, loin de toute pollution, de tout bruit, si ce n'est, parfois, au loin, le coup de fusil d'un chasseur. L'osmose parfaite.
Mais, évidemment, cette atmosphère enchanteresse (en tout cas, en apparence !) est perturbée par l'arrivée de deux citadins, un homme et une femme, chargés de présenter un projet de construction d'un glamping, destruction inconsidérée du lieu idyllique et rentrées financières considérables pour l'entreprise inclus. Ce qui donne lieu à un échange tendu, sous des airs retenus, pour ces deux personnes, ne connaissant rien à leur sujet, vite laminés par les ruraux, d'un redoutable pragmatisme. Cette réunion, filmée quasi dans toute sa longueur, n'aurait pas détonné chez le documentariste américain Frederick Wiseman ou chez les réalisateurs roumains, Cristian Mungiu ou Radu Jude.
Puis, on fait un surprenant bon géographique pour montrer la déconnexion du grand patron, n'ayant pas le moindre sens des réalités, trop obnubilé par le dieu Pognon, qui a passé commande de ce glamping. Mais ce bond est surtout un prétexte pour nous introduire les deux citadins, les mettre en avant, en particulier l'homme du duo.
J'arrête pour ce qui est de balancer le contenu. Je vous laisse le plaisir de la découverte. J'ajoute juste que la conclusion,
ambiguë, surprenante par sa brusquerie et sa brutalité (contrastant singulièrement avec tout ce qui a précédé, quoique l'on puisse percevoir des indices avant-coureurs !), ne manquera pas de vous faire creuser la cervelle, bien après la fin de la projection, et de vous faire chercher sur Internet toutes les interprétations possibles.
Si le discours de fond n'est guère subtil (les urbains ne sont réellement pas des flèches en ce qui concerne la vie des campagnards... oui, j'ai connu Hamaguchi plus fin quant à la caractérisation de ses caractères !), la narration, scénaristique, sonore et visuelle, faisant appel au sensoriel, à travers les extérieurs, la lenteur globale et la musique d'Eiko Ishibashi, collant très bien aux images qui défilent (ce qui n'est guère étonnant vu qu'à l'origine, ce qui a abouti au long-métrage aurait dû être un court-métrage accompagnant un live de la compositrice !), ne cesse de fasciner.
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Créée
le 11 avr. 2024
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