Deuxième collaboration du duo français, Le Manège met en scène les créatures pâles et amorphes de Marc Caro, visages ébahis et angoissés drapés de noir, dans une froide nuit parisienne où la pluie ruisselle sur les pavés. Jean-Pierre Jeunet filme alors
une poésie de l'impitoyable mécanique de la vie
autour du manège hypnotisant, un instant de bonheur figé mais éphémère, et dévoile le triste passeport pour l’esclavage qu’il promet derrière le pompon de laine rouge. Bruno Delbonnel est déjà là, compère des premières heures, et participe aux ténèbres denses de la danse du manège.
Désillusion et mécanique dans l'ambiance vieillotte d’un Paris obsolète de cartes postales, l’empreinte des deux jeunes réalisateurs marque fortement, et annonce déjà une atmosphère de leur filmographie à venir.
Un amour des gueules et du mouvement,
une envie oppressante de bouger les lignes de la narration cinématographique par-delà le respect qu’ils en ont pour chanter la vie désenchantée et dévoiler les innombrables mécaniques anodines qui entraînent de pauvres individus dans une danse toujours trop grande pour eux.