American Race
On ne peut pas dire qu’on n’est pas prévenus : un biopic sur une victoire américaine par Ford contre Ferrari n’impliquait pas vraiment un traitement dans la dentelle. Deux fausses pistes laissaient...
le 18 nov. 2019
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Puisqu'il y a tant de bonnes histoires à suivre chez vous sur votre tv (par pitié, pas sur vos téléphones...), mises en scène par des réalisateurs de plus en plus prestigieux, vous vous demandez sans doute parfois "pourquoi aller au cinéma?".
Et bien Le Mans 66 répondra sans aucun mal à votre question; car James Mangold nous livre un film si beau que vous voudriez accéder aux paddocks visités, voire aux cockpits, soyons fous.
Si beau que vous ne regretteriez pas de voir ces bolides s'affronter sur le plus grand écran, ni de savourer avec le meilleur son possible la performance de ce casting particulièrement en forme.
Si l'on pouvait craindre au vu de la bande-annonce que le film nous dépeigne les gentils de chez Ford contre les méchants de chez Ferrari, heureusement il n'en est absolument rien.
Le Mans 66 est avant tout une oeuvre de personnages et non de course pure; Matt Damon joue Carroll Shelby, un champion contraint de se retirer suite à des problèmes cardiaques. Il devint alors concepteur et vendeur de voitures de sa propre marque, en plus de manager la carrière de quelques pilotes, dont la tête brûlée qu'est l'Anglais Ken Miles, campé avec insolence par ce caméléon de Christian Bale.
Les deux compères sont dans le creux de la vague quand une belle opportunité frappe à leur porte.
En effet, Henry Ford II, pour redorer son image de marque et celle de son entreprise, souhaite que Ford participe aux 24H du Mans et renverse la suprématie d'Enzo Ferrari dans le domaine de la course automobile.
Et c'est au sein cette dramaturgie que tous types de spectateurs, y compris ceux qui n'ont pas d'affinité avec la course, y trouveront leur compte. Car une lutte interne s'engage alors pour Shelby et Miles: ces deux purs-sangs idéalistes qui cherchent à imposer leur vision fantasmée de la course à une industrie tenue par un magnat dont le seul but de gagner est motivé par la fierté mal placée et la cupidité.
Le "tout puissant" Henry Ford II est bien évidemment suppléé par une pléiade de commerciaux et d'avocats qui ne sont pas tous véreux (le film ne tombe pas dans ce piège grossier) même si certains membres mettent de fameux bâtons dans les roues de nos artistes d'ingénierie et de pilotage.
Le cinéaste James Mangold dresse donc ici un parallèle on ne peut plus clair entre son histoire et la situation réelle de n'importe quel artiste hollywoodien; on imagine effectivement qu'il a, comme bien d'autres, dû batailler ferme pour imposer sa vision d'auteur aux studios qui sont principalement intéressés par le succès commercial.
Et la bataille doit être encore plus rude quand il s'agit d'un film "old school" comme Le Mans 66, qui traite d'une époque sexy mais révolue (une ère où les pilotes avaient vraiment les cojones de risquer leur peau dans des cercueils à 4 roues) , avec des effets spéciaux usant le moins possible d'images de synthèse puisque tout, des voitures aux paddocks, a été reconstruit en dur.
A notre époque des blockbusters franchisés, imaginez cet OVNI de 100 millions de dollars à vendre à un grand studio...
Pas une mince affaire!
Mais restons rêveurs, Mangold les a sans doute convaincus avec ses talents de conteur (les 2h32 de film passent à une vitesse folle) et de directeur d'acteurs qui culminent à leur apogée dans un dernier acte époustouflant de réalisme et de justesse dans l'émotion.
Aussi, toutes les interprétations sonnent juste: Caitriona Baffle joue avec brio l'épouse de Ken Miles, sans avoir le rôle cliché de la femme systématiquement inquiète et désapprobatrice. Jon Bernthal est un Lee Iacocca tout en charisme. Matt Damon reste parfait dans son rôle du gars intègre qui sert de soutien à un personnage plus fort, celui de Christian Bale, toujours aussi impressionnant de naturel et qui conserve (voire appuie), une fois n'est pas coutume, son accent britannique pour rendre son amusement on ne peut plus communicatif et rayonnant à l'écran.
Il confirme une nouvelle fois son statut de très grand acteur, l'un des (LE?) meilleurs de sa génération, à n'en point douter, qui élève Le Mans 66 au rang de film de l'année, à mon humble avis.
Avec cette oeuvre épique parfaitement rythmée, aux dialogues bien ciselés, James Mangold adapte une "histoire vraie" en s'en tenant le plus possible aux faits réels (oui, après vérification), avec juste ce qu'il faut de polish pour rendre sa métaphore du business cinématographique percutante.
Il nous gratifie de son premier chef-d'oeuvre, un film complémentaire à Rush (de Ron Howard) qui se concentrait sur le pilotage là où Le Mans 66 traite des acteurs de l'ombre d'un succès sportif d'une telle ampleur.
Conseillé: A ceux qui ont aimé Rush et qui sont plutôt fast que furious ;-).
Déconseillé: A personne. Vous êtes encore là? Foncez, il est toujours en salle !
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Créée
le 5 janv. 2020
Critique lue 126 fois
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