Cimécanographe

Buster Keaton avait dit dans ses mémoires que son film préféré c'est celui qui fut un échec aussi bien par la presse que par le public.

L’histoire racontait les mésaventures d’un pauvre mécano, Johnnie Gray, qui allait poursuivre désespérément sa locomotive, la général, détournée par un groupe d’espions nordiste.
Une histoire vraie, prétexte à d’innombrables gags plus inspirés les uns que les autres et distillés par un Buster Keaton au sommet de son art. Car Keaton n’avait jamais été aussi génial que dans ces rôles où il n’essayait jamais d’être drôle mais où tout lui tombait dessus et où il s’ingéniait à trouver des solutions pour y remédier. C’était de l’horlogerie suisse au niveau de la précision. Ça tombait quand ça devait tomber et ça marchait.

Comme disait un critique à propos de lui : "C’est tout Keaton de risquer sa vie pour un éclat de rire".
Mais là où le film demeure encore vraiment bluffant, c’était au niveau du réalisme de la reconstitution historique. Il n’y avait aucun anachronisme : les costumes, les paysages, les maisons, les locomotives, tous les moindres détails étaient rigoureusement authentiques. Keaton, appliquait aussi à lui-même ce réalisme puisque tous les gags, même les plus extravagants, restaient du domaine du possible. La preuve : il les réalisait lui-même. Et on voit que certains étaient particulièrement dangereux comme celui où il était assis sur la bielle de la locomotive en marche !

Au-delà de tout cela, Keaton s’avérait être un excellent réalisateur. Les scènes de travelling sur la locomotive étaient maîtrisées à la perfection et pour un film qui n’avait pas de scénario précis au départ, ce que nous en avait donné Keaton demeurait d’une construction remarquable.

Bien sûr, plusieurs de ses films méritent d'être classés parmi les meilleurs de l'histoire du cinéma comique, mais The General reste sans aucun doute mon film préféré du stoïque homme qui ne rit jamais, une très belle comédie qui me procure une joie immense à chaque fois.