Traîtrises et complots au royaume de France

Le film s'appuie sur la rivalité opposant Charles le Téméraire au roi de France Louis XI. Grand seigneur et cousin du roi (qu'il surnommait "l'universelle aragne" parce qu'il tissait sa toile habilement en abattant ses ennemis non par la force mais par la ruse), Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, jouissait d'une puissance considérable, son duché étant un fief très riche. Assoiffé de pouvoir, il souhaitait agrandir son domaine, et si la couronne de France s'offrait à lui par opportunité, alors pourquoi pas ?. le Miracle des loups dont le titre justifie une scène assez courte mais marquante, se sert donc de tout ce fond historique pour broder une intrigue crédible où se mêlent contraintes politiques et aventures romanesques.
Après une première version muette réalisée par Raymond Bernard en 1924, cette co-production franco-italienne (avec une plus grande part française par ses techniciens, acteurs et décors) permet une réalisation luxueuse en couleurs, bien ordonnée par André Hunebelle, spécialiste du genre. C'est un faux film de cape & d'épée puisque son décor est celui du XVème siècle, le Moyen Age n'étant pas celui des fleurets et des perruques poudrées, mais le réalisateur offre cependant de beaux combats, dont un duel final à outrance, avec de lourdes épées à deux mains, qui renvoie à celui du Ivanhoë hollywoodien.
La direction artistique est soignée, les costumes somptueux, les décors sont ceux du château de Pierrefonds (déjà utilisé dans le Bossu et le Capitan) et de la Cité de Carcassonne qui figure la cité picarde de Péronne (dont il ne reste aujourd'hui que de maigres vestiges). Dans ce château de Péronne, s'est joué un événement capital de l'Histoire de France : le bouillant Téméraire y séquestra le roi, ce fait est donc relaté ici.
En plus de ces décors, Hunebelle réutilise son équipe habituelle : le maître d'armes Claude Carliez, le musicien Jean Marion, et son acteur fétiche Jean Marais qui avec son incroyable charisme incarne un noble chevalier, Robert de Neuville, bon bretteur et loyal qui tente de déjouer les plans du Téméraire et de son espion introduit à la cour, le comte de Senac incarné par Guy Delorme, toujours aussi performant dans les rôles de fourbes. Il retrouve Marais en duel dont l'issue n'a bien sûr pas de surprise pour le spectateur. Le reste du casting est riche : Roger Hanin en duc de Bourgogne rageur et fougueux, Jean-Louis Barrault en savoureux roi Louis XI, quelques bons seconds rôles comme Georges Lycan ou Louis Arbessier, et contrainte de la co-production, la belle Rosanna Schiaffino, vue dans quelques péplums italiens comme L'enlèvement des Sabines.
Le récit est donc entièrement fictif et se sert du cadre historique comme dans Quentin Durward (qui évoluait aussi à la cour de Louis XI), c'est ce qui me plait tant dans ce genre de film, ce n'est pas de l'Histoire de France grave et redondante. L'attrait du récit, le ton héroïque, la dynamique du film historique rapprochent cette production de prestige des productions hollywoodiennes du même style comme Ivanhoë, Prince Vaillant ou Quentin Durward, c'est plein de panache, d'action et de félonie, des ingrédients typiques d'un certain cinéma des années 60 en France. Un très beau film.

Ugly

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