Si on considère que la semaine commence par le dimanche, alors mon premier visionnage sur grand écran d'un film de Tarkovski l'initie. Cinq jours plus tard, je décide enfin d'écrire ma première "critique" sur cet homme.
Le Miroir a également été mon tout premier Tarkovski. Je n'étais pas entièrement rentré dedans mais j'avais quand même ressenti cette sensation si fréquente et inexplicable, cette sensation de curiosité envers ce film, le besoin d'en connaître le sens caché (s'il en existe un). Alors j'ai commencé à m'intéresser de plus près à ses autres films, chaque visionnage me rapprochant de quelque chose que je n'arrivais toujours pas à saisir.
Selon beaucoup, ce film résume la filmographie et la vie de Tarkovski. Je n'ai pas encore vu tous ses films, et écrire sur ce personnage m'est assez difficile. Mais il y a des jours où les événements extérieurs rendent certaines choses essentielles. Et c'est le cas en ce vendredi soir car je me rends compte que pendant cette semaine, Le Miroir a constamment eu une influence pas seulement sur moi-même, mais également sur tout ce le monde, tout ce que je ne peux contrôler.
Ce film n'est pas vraiment un film, je le considère plus comme un poème révélateur de choses des plus vastes aux plus intimes sur la propre vie du spectateur. Et je me rends compte aujourd'hui de la chance infinie que j'ai eu d'avoir pu pénétrer dans l'univers de ce réalisateur, même si le chemin que j'ai à parcourir est encore très long.
En nous proposant le miroir de sa vie, Tarkovski nous offre le présent le plus précieux qu'on pourrait recevoir : il offre à chaque spectateur le miroir de sa propre vie, et bienheureux sont ceux qui se reconnaîtront. L'écran du cinéma tient là son rôle le plus noble, celui pour lequel il a été crée.
S'il s'agissait du hasard, il ferait parfaitement bien les choses. Mais je ne crois plus au hasard, plus maintenant. Ou alors il prend le nom de génie (ou de dieu, ou de nature...). Je connais trop peu l'histoire de l'art pour en donner une définition précise, mais je suis convaincu que la puissance que ce génie artistique peut avoir sur nos états d'âme est inégalable dans le monde de la raison.
Tout dans Le Miroir se réfère à ma propre vie, mes propres réflexions, que ce soit de l'ombre de la perche (souhaitée ?) derrière Iouri qui n'arrive pas à parler jusqu'au narrateur qui dit qu'il voulait simplement être heureux. Et les poèmes de son propre père rendent le tout éternel, le transfert de la fibre artistique du père au fils s'effectuant en parfaite harmonie.
Tout ce film se passe de mots, de jugements et de commentaires, c'est un poème tout simplement. Il parlera à certains, pas à d'autres. Mais je souhaite du fond du coeur que tout le monde connaisse une expérience semblable avec n'importe quelle oeuvre.
J'ai passé la semaine la plus folle de ma vie, et elle a commencé par Le Miroir. Je ne sais donc pas si le hasard existe, mais l'art est bien réel. Et il concilie si bien toutes les formes de l'univers imperceptibles par l'être humain qu'il mérite amplement qu'on y consacre une vie entière. Je pensais en être intimement convaincu, mais ce n'était rien par rapport à ce que je pense aujourd'hui. Et ça n'est surement rien par rapport à ce que je penserai demain. Mais en voyageant entre futur et passé, Tarkovski arrête le temps pour nous montrer la beauté sous sa forme la plus pure. Cette grâce, seul un vrai artiste peut l'avoir. Or, en chacun de nous se cache un artiste et un génie. Et si on était convaincu de son existence, on se rendrait compte que notre monde est loin d'être noir. Alors je te remercie, ô grand Miroir, de m'avoir prouvé l'existence du rêve dans la réalité.