Si les trois premiers longs métrages de Tarkovski ont, à mon sens, été de plus en plus marquants et puissants (avec comme sommet l'hypnotique et magistral Solaris), Le Miroir constitue une légère déception pour un cinéaste qui m'avait, jusque-là (je n'ai vu que ses 3 premiers films) habitué à l'excellence. Surement l'une de ses œuvres les plus autobiographiques, à travers laquelle il nous fait suivre une succession de souvenir d'un mourant, allant des années 1930 aux années 1970.


Un récit assez décousu finalement, où l'on voit un vieil homme qui revient sur sa propre vie, de manières non chronologiques, et qui se remémore ses rencontres, ses souvenirs de jeunesse et ceux qui l'ont marqué, notamment deux femmes, sa mère et sa femme (admirablement jouée par la même actrice, Margarita Terekhova). Tel Marcel Proust, il semble rechercher le temps perdu, explorant son âme et ses souvenirs auxquels Tarkovski donne un fort sentiment de mélancolie à travers des tableaux, souvent magnifiques.


La force de Le Miroir se situe là, à travers des images auxquels Tarkovski donne de la puissance et ce dès le début du film, via ce premier retour en arrière et les magnifiques plans filmant la campagne et l'attente d'une femme. Le metteur en scène d'Andreï Roublev déborde d'idées, tant dans l'écriture que dans sa mise en scène, ses cadres débordent de détails et d'intérêt sans en devenir lourd tandis que l'on retrouve à travers ses souvenirs un miroir omniprésent et le symbole du temps qui passe. Le Miroir est riche et créatif, et Tarkovski aborde la vie et la façon dont on voit la sienne et ce qu'on en garde, tout comme il dresse sa vision de la famille et de l'image de la mère.


Pourtant, Le Miroir me laisse sur une certaine déception, cette impression d'avoir admiré de magnifiques tableaux mais qui manquaient d'émotion et de lyrisme, à l'exception de quelques scènes, surtout au début à l'image de l'inoubliable incendie (comme dans Solaris ou L'enfance d'Ivan, Tarkovski a l'art de filmer la nature comme personne). Plus le film avance, plus cette succession de souvenirs manque de clarté qui, ajoutée à cette absence d'atmosphère, aboutie sur quelques longueurs lors de la seconde partie du récit et un côté déroutant qui a fini par m'éloigner du récit. Finalement c'est un gout amer pour un film qui a si bien débuté et qui montre, à nouveau, tout le talent de Tarkovski pour donner une beauté plastique à ses œuvres, tout en y explorant l'âme de ses personnages mais qui ici, et contrairement à ses films précédents, manque d'émotion et de clarté parmi cette succession de souvenirs.


Première légère déception avec le cinéma de Tarkovski, lui qui m'avait hypnotisé et marqué avec des films comme Andreï Roublev et surtout Solaris. Une oeuvre puissante et belle mais qui manque d'émotions et de sens pour totalement convaincre, et ce malgré un réalisateur qui montre toutes les facettes de son talent.

Docteur_Jivago
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le 5 mai 2015

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