Seul au monde, ou presque
Le monde, la chair et le diable fait partie de ces films de S.F. des 50’s injustement oubliés même si, très clairement, l’utilisation d’un univers post-apo ne sert que de transposition aux problèmes sociétaux de l’époque. Mais ceci n’est pas nouveau. En pleine guerre froide et alors que l’ennemi ne peut-être que communiste, Hollywood joue sur les peurs fantasmées de ses spectateurs à partir d’invasions extra-terrestres, d’espions sadiques et de catastrophes nucléaires.
C’est ainsi que dans Le monde, la chair et le sang, Ralph Burton se retrouve coincé dans une mine alors qu’il finit sa journée de travail. Attendant quelques jours que les secours arrivent, il réussit à s’extirper seul des décombres pour faire face à un monde sans vie. Il comprend rapidement qu’un nuage radioactif a fait table rase des US alors qu’il était sous terre, et choisit de se diriger vers New York.
Le film débute de manière très classique, Ralph (interprété par Harry Belafonte, oui LE Harry Belafonte qui chante) errant dans les rues désertes, trouvant chaque jour des moyens de combler sa solitude et d’affronter un monde qu’il ne reconnaît plus. MacDougall choisit cependant de se démarquer de pas mal de séries B de l’époque par son économie d’effets. Pas de rues dévastées ou de traces du violent bouleversement, simplement Big Apple nue, baignée par la lueur de l’aube. Le réalisateur réussit de très beaux contrastes dans l’utilisation du noir & blanc qui, appuyés par un traitement sonore soigné entre échos et silence, rend avec justesse l’isolement de Ralph.
C’est dans sa seconde partie, alors que le mineur fait la rencontre de la jolie Sarah Crandall, que le film bascule de manière surprenante. Car c’est la ségrégation, encore bien présente aux États-Unis et les relations blancs/noirs, qui se placent au cœur du métrage. De manière aussi subtile que poétique, MacDougall décrit une histoire d’Adam et Eve qui aimeraient profiter de ce nouveau monde sans ne plus s’encombrer de préjugés mais pour qui ceci n’est pas si simple. Entre besoin de visualiser l’avenir et de sauvegarder ce qu’il reste du passé, tous deux évoluent dans un présent quasi imaginaire, jusqu’à ce qu’un évènement vienne de nouveau bouleverser ce fragile équilibre.
La paranoïa ambiante explosera alors, brouillant les pistes sur l’origine de l’ennemi et plus encore, sur les raisons qui le poussent à la haine. Même si le final est un peu faiblard comparé aux dernières séquences intenses du Monde, la chair et le diable, le film n’en reste pas moins une vraie curiosité à enfin découvrir en DVD.