Le Monstre est un drame à la carrière particulière. Prévu pour sortir en 2018, il n’a de cesse été repoussé avant de se retrouver sur Netflix qui n’est décidément pas avare en exclusivités ce mois-ci avec l’arrivée de nombreux films comme Oxygène d’Alexandre Aja ou encore La Femme à la fenêtre de Joe Wright en attendant le Army of the Dead de Zack Snyder en fin de semaine. Il sera donc difficile pour le film d’Anthony Mandler de se démarquer, dont c’est la première réalisation, lui qui s’est fait un nom dans la réalisation de clips musicaux. D’ailleurs, cela se ressent dans la mise en scène, un soin est particulièrement apporté dans le choix des couleurs et le cadrage pertinent de la plupart des séquences. Loin de tomber dans les abus faciles, le metteur en scène se distingue par une certaine maitrise de sa caméra. Le film prend la décision de nous insérer directement au sein du procès de cet adolescent accusé de complicité d’un braquage d’une épicerie qui tourne mal par deux hommes d’un gang de son quartier qui terminera par le meurtre du propriétaire. C’est certes l’histoire d’un procès mais le film décide de se focaliser sur son protagoniste en lui apportant de la profondeur à coup de nombreux flashbacks qui s’installent durant ce procès nous permettant d’en apprendre plus sur ce dernier. Le film a l’intelligence de proposer une ambiguïté autour de son personnage, impliquant ainsi le spectateur à l’image d’un jury de trancher sur la culpabilité jusqu’au dénouement final. On ne peut que féliciter la prestation du jeune acteur, Kelvin Harrison Jr., dans ce rôle, on a déjà pu l’apercevoir dans Les Sept de Chicago (2020) ou Assassination Nation (2018). Malgré son jeune âge, il n’a rien d’un bleu et démontre un talent certain. Autour de lui, on souligne la présence d’acteurs de renom comme Jeffrey Wright ou encore John David Washington, mais leurs personnages respectifs ne sont malheureusement pas assez creusés du fait d’un manque de présence à l’écran. Leur interprétation est également impeccable mais cela ne suffit pas car le film a décidé de poser sa caméra sur ce jeune homme. Ce choix se montre néanmoins discutable, si le protagoniste central est très bien écrit, on pourra regretter que les personnages l’entourant souffrent d’une certaine transparence. Par ailleurs, malgré que le film puisse s’appuyer sur une réalisation globalement sans fausse note, il a pourtant un côté trop contemplatif. Encore une fois, sans tomber dans les clichés clippesques, le film est conscient de sa solidité visuelle et ne se donne pas les moyens de ses ambitions oubliant de creuser davantage de l’émotion dans plusieurs de ses scènes avant un final plus poignant qui vient rehausser notre intérêt sur l’avenir de ce jeune homme en apportant plus de suspense dans ce drame judiciaire un poil longuet qui manque de rythme. Le Monstre est loin d’être un film mauvais mais on ne peut que constater d’avoir vu mieux ailleurs, on pense évidemment dans le même registre à la superbe minisérie Dans leur regard (2019), également disponible sur la plateforme de streaming. La comparaison ne joue pas en faveur du film pointant du doigt ses faiblesses par rapport à celle-ci qui réussissait sur tous les points. Mais le film nous réserve de belles surprises et nous offre notamment une composition efficace avec une exploitation pertinente de partitions qui tentent de combler ce manque d’émotion. Enfin, on aurait préféré que le film se focalise davantage sur certaines scènes notamment dans les rapports avec ses proches que ce soit sa famille, ses amis ou encore ses camarades de lycée. C’est souvent survolé et le film se concentre sur les relations entre le jeune protagoniste et ce gang de quartier en adoptant un ton très descriptif. Le film propose ainsi un sujet profond qui manque d’émotion malgré le jeu solide de ses acteurs et une mise en scène léchée, il lui manque une âme pour vraiment faire la différence.