Adapté de Brian Selznick, Wonderstruck est une délicate ode à l’enfance dans laquelle Todd Haynes manie propositions formelles et émotions.


Ben vit dans les années 70, Rose dans les années 20. Ils sont sourds mais chacun d’entre-eux se lancent dans une quête similaire : retrouver un parent inconnu ou disparu. WONDERSTRUCK est un film surprenant à bien des égards. D’abord il y a ce parti-pris formel imposant : revenir au noir et blanc pour le traitement des années 20, en refaisant carrément du film muet. Cette intention va contaminer l’autre axe scénaristique dans les années 70 lorsque Ben va à son tour devenir sourd. La musique devient donc un élément essentiel dans la narration du film, afin d’exacerber les émotions des deux enfants face au monde qu’ils sont en train de découvrir. La proposition est forte, et compliquée à tenir, lorsqu’on voit que l’outrance de musique peut totalement faire déjouer un film.Mais Todd Haynes y va, franco. Le spectateur est logiquement secoué, tiraillé entre les multiples bonds dans le temps, l’alternance couleurs/noir et blanc puis la masse de musiques lui arrivant en rafales. Et la magique opère lorsque, délesté des dialogues, le film s’en remet à la force l’image – et par extension à celle du 7ème Art dans sa forme la plus pure, avant le parlant – pour faire comprendre les événements en cours. On en revient à du cinéma d’un autre temps, mais avec un goût d’aujourd’hui qui traîne. Du cinéma intemporel.


Ensuite, il y a le lien entre ces deux histoires parallèles qui demeure flou. Sont-elles réellement liées ? Est-ce juste un jeu de miroirs ? La réponse viendra bien plus tard. Ce mystère, Todd Haynes l’entretient, tout en s’aventurant dans une exploration des sentiments liés à enfance. Cet âge de la découverte, de la curiosité, de l’insouciance, de l’amusement. Indéniablement, du merveilleux se niche dans WONDERSTRUCK. En dehors de toutes les qualités du film, les 30 dernières minutes font franchir un cap à l’ensemble en nous faisant pénétrer dans le Queens Museum pour admirer la somptueuse maquette miniature de New-York. L’apothéose émotionnelle coïncide avec l’arrivée des réponses à nos questions. Et le titre prend tout son sens (quelle grossière erreur de la renommer Le Musée des Merveilles en France) Tout s’imbrique, se dévoile, fonctionne. La façon délicate et précise qu’a Haynes de construire son film est remarquable. En dépit de petits soucis de rythme, le chemin parcouru est simple mais les émotions ressenties sont fortes.


Par Maxime Bedini pour Le Blog du Cinéma

LeBlogDuCinéma
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste CANNES 2017 - SÉLECTION OFFICIELLE

Créée

le 29 mai 2017

Critique lue 315 fois

Critique lue 315 fois

D'autres avis sur Le Musée des merveilles

Le Musée des merveilles
takeshi29
9

Todd Haynes, plus si loin du paradis

L'exemple parfait de ce que devrait être un film familial. Haletant, merveilleux (Le titre original ne ment pas), émouvant, intelligent, d'une inventivité formelle incroyable, "Le Musée des...

le 18 nov. 2017

34 j'aime

8

Le Musée des merveilles
Sergent_Pepper
5

Robinet de curiosités

Après Scorsese et son Hugo Cabret, c’est à Todd Haynes de céder aux charmes de l’écriture de Brian Selznick et son Wonderstruck, dans lequel on retrouve ce qui tapa dans l’œil du papy cinéphile : le...

le 19 mars 2018

21 j'aime

7

Le Musée des merveilles
Kiwi-
5

Wonder Oddity.

De tous les films de la sélection officielle du 70ème Festival de Cannes, « Le Musée des Merveilles » est bien l’un des seuls que l’on pouvait attendre d’emblée comme un futur classique. Après «...

le 5 juin 2017

17 j'aime

Du même critique

Buried
LeBlogDuCinéma
10

Critique de Buried par Le Blog Du Cinéma

Question : quels sont les points communs entre Cube, Saw, Devil, Frozen et Exam ? Ce sont tous des films à petit budget, dont le titre tient en un seul mot, et qui tournent autour du même concept :...

le 21 oct. 2010

43 j'aime

4

The Big Short - Le Casse du siècle
LeBlogDuCinéma
7

Critique de The Big Short - Le Casse du siècle par Le Blog Du Cinéma

En voyant arriver THE BIG SHORT, bien décidé à raconter les origines de la crise financière de la fin des années 2000, en mettant en avant les magouilles des banques et des traders, on repense...

le 16 déc. 2015

41 j'aime

Un tramway nommé désir
LeBlogDuCinéma
10

Critique de Un tramway nommé désir par Le Blog Du Cinéma

Réalisé en 1951 d’après une pièce de Tennessee Williams qu’Elia Kazan a lui-même monté à Broadway en 1947, Un Tramway Nommé Désir s’est rapidement élevé au rang de mythe cinématographique. Du texte...

le 22 nov. 2012

37 j'aime

4